J'étais à Time square depuis la veille, et arriver dans une ville que vous ne connaissez pas, avec aucune tête connue, ce n'est pas facile. Heureusement, j'avais rencontré Kaleb la veille, mon charment voisin. Allez savoir pourquoi, mais je me suis confiée à lui, sur ce qui m'avait poussée à venir ici. Je n'ai pas tellement eu le choix en même temps quand la tête de ma soeur est apparue sur la télé de son appartement. Bref. J'avais passé une plutôt bonne soirée bien que mouvementée au niveau des émotions. En rentrant chez moi, j'avais eu beaucoup de mal à trouver le sommeil, et une fois fait, j'avais dormi pratiquement toute la matinée. J'étais un peu du genre insomniaque, ou du moins, la nuit ! Et je dormais quelques heures sur le matin, quand j'avais le temps en tout cas. En ce moment c'était le cas, et grâce à mes économies, je m'étais donné un an pour finir d'écrire mon roman, et trouver un éditeur. Soit, pas de boulot alimentaire pendant un an. C'était déjà ça. Mais de là à rester chez moi 24h sur 24 pour bosser, c'était autre chose. Et après avoir passé la moitié de la journé à dormir, et l'autre moitié à écrire, il était déjà 23h. Je n'allais pas déranger mon gentil voisin juste parce que j'avais besoin de compagnie.

Je décidais donc de m'habiller et d'aller faire un tour pour rencontrer du monde. Une fois fait, le premier lieu qui me venait à l'esprit était : un bar. En plus, une bonne vodka melon pour parer à ma migraine serait une bonne alternative au doliprane. Je fermais mon appartement après avoir enfilé ma petite veste en cuir, et je descendais les marches de l'escalier dans une allure plutôt soutenue. Ca me faisait penser qu'il allait falloir que je me remette au sport. Depuis que j'avais eu Lucy, je n'avais pas fait trop de sport...

A peine 30 minutes plus tard je me retrouvais devant le "Fitzgelard", l'ambiance avait l'air bonne, je poussais alors la lourde porte et balayais l'horizon du regard. Un place m'attendait juste là devant le bar. C'était parfait pour un début d'approche avec cette nouvelle ville, et cette nouvelle vie. Je me hissais sur le haut tabouret et retirais ma veste avant de faire signe à la serveuse. Cette jolie brune arrivait vers moi et avec un joli sourire très professionnel, elle me demanda ce que je voulais boire. `"Je vais prendre une vodka melon, s'il vous plait !". Elle repartit illico un peu plus loin pour me préparer mon cocktail. Je ne la lâchais pas du regard, au début ne comprenant pas pourquoi, mais finalement, c'est en regardant son attitude, sa façon de regarder les gens, que je remarqua quelque chose. Cette fille aimait les femmes. Enfin, c'est ce que je ressentais. Et je ne me trompais que très rarement sur ce sujet.

Je ne me considérais pas comme étant homosexuelle, ni comme était hétérosexuelle. Ni bi d'ailleurs, bien que c'est le terme qu'on m'approprie le plus souvent. Disons que je suis ouverte à ma sexualité, et que mes coups de coeurs peuvent se porter autant sur une femme que sur un homme. Je n'ai pas eu beaucoup de relations avec des femmes dans ma vie, 3 ou 4 seulement, mais ça m'a suffit pour me rendre compte que les femmes ont réellement quelque chose qui m'attire, sans doute la douceur, je ne sais pas. Toujours est-il que j'avais remarqué le penchant de cette jolie serveuse pour les femmes. Loin de moi l'idée de la draguer bien qu'elle était vraiment très jolie. Ce n'était pas du tout mon genre, et je n'aimais pas draguer. Je suis le genre à montrer quand quelqu'un me plait, mais jamais à faire du rentre dedans franc. Elle me rapporta mon cocktail et je lui offris un large sourire dont j'avais le secret. "Merci beaucoup..."

Je ne savais pas si elle avait senti que je la regardais avec insistance, mais je pouvais aisément croiser chaque regard en coin qu'elle me lançait. Et chaque fois, j'esquissais un petit sourire amusé. Je ne voulais pas non plus l'intimider, elle avait l'air d'être quelqu'un de légèrement timide. Et je n'étais absolument pas là pour faire fuir les gens, bien au contraire. Je finissais ma vodka assez rapidement, et au moment où elle passait devant moi je l'arrêtais et me penchais un peu plus sur le bar pour me rapprocher d'elle et ainsi me faire comprendre, il y avait quand même pas mal de bruit, et la musique n'arrangeait rien. "Je peux te demander où sont les toilettes ?" Elle m'indiqua une porte pas très loin du bar et je la remerciais d'un hochement de tête. Je descendais alors de mon tabouret, laissant là ma veste pour garder ma place. JE me faufilais jusqu'aux toilettes et en en ressortant, je tombais nez à nez avec la jeune serveuse, lui rentrant pratiquement dedans. "Oh mon dieu j'suis désolée ! Pourtant j'ai bu qu'un seul verre !!" Je lâchais un petit rire amusé et c'est alors qu'elle m'adressa un joli sourire à son tour. Peut être que j'allais me faire une amie fisse en venant ici ce soir ? Qui sait..!!

« Tu bosses au Fitz ce soir? » Je fis un léger hochement de tête, cherchant désespérément quelque chose à me mettre pour me rendre au bar. Je venais à peine de rentrer d'une séance photo où j'ai dû maquiller des mannequins squelettiques et vraiment pas sympathiques. Je pris un slim noir entre mes mains et le tendis devant moi pour mieux le regarder à la lumière de ma chambre. « Tu seras prudente hein? » Je suis obligée de lâcher un petit rire. « Qu'est-ce que tu veux qu'il m'arrive mon cher grand frère ultra protecteur? » Je sais que Donovan s'inquiète pour moi, qu'il ne veut pas m'embêter exprès mais simplement qu'il a promis à maman de garder un oeil sur moi quand elle était sur son lit de mort. Simplement, j'ai vingt quatre ans et j'aimerais qu'il me laisse un peu d'air. Je sais déjà que si j'avais l'argent, je prendrais mon propre appartement mais vu que ce n'est pas le cas, je n'ai pas le choix de partager ce trois pièce avec mon frère adoré. J'attrape un autre slim un peu satiné, presque imitation cuir. Avec mon t-shirt du bar, ça pourrait bien donner. Allez hop, je l'enfile, me fichant pas mal de savoir que mon frère est dans la même pièce que moi. Après tout, il a changé mes couches sales quand j'étais bébé alors je crois qu'il ne va pas être choqué de voir mes fesses. « ... Et tu comptes mettre ce pantalon?! Comme si le t-shirt du Fitz était pas déjà assez décolleté comme ça! » Je soupire et ferme le bouton de mon pantalon. « Donovan, je suis désolée de te le faire remarquer mais je bosse dans un bar, pas dans un couvent! » Sans rien ajouter, je me hisse sur la pointe des pieds et embrasse mon frère sur la joue avant d'enfiler mon blouson et de quitter l'appartement.

Comme toujours quand je bosse au bar, j'attends qu'un taxi s'arrête devant l'immeuble. Je pourrais très bien me déplacer avec ma voiture mais je l'utilise qu'en cas de nécessité extrême. Je suis très mauvaise conductrice et j'ai très peur derrière le volant. Je préfère utiliser les bus ou le métro la journée et payer un taxi le soir pour me rendre au centre ville. En plus, mon frère est plus détendu de savoir que c'est un chauffeur qui m'amène sur mon lieu de travail plutôt que je traverse les ruelles sombres en ballerines et pantalon moulant.

Enfin bref. Je paie ma course au chauffeur et rentre par la porte de derrière avant d'enfiler mon tablier noir où je glisse un bloc note, stylo et autres petites affaires dont je pourrais avoir besoin derrière le bar. C'est ma collègue qui s'occupe de la salle ce soir, alors je me charge de servir les clients au comptoir. Un tournus tout ce qu'il y a de plus simple. Il est déjà vingt heures et le bar commence à se remplir. Je passe un coup de chiffon sur le comptoir et prépare les bières au frais, vérifie que les bouteilles d'alcool fort sont encore pleines et me mets à servir les clients. Des hommes pour la plupart. J'ai pris l'habitude de me faire draguer quand je suis derrière le comptoir mais j'avoue que je ne me sens pas toujours très à l'aise.

Les heures passent et je ne fais même plus vraiment attention aux visages que je sers. A ce stade c'est "bonjour, votre commande? Voici, merci." et basta. Sauf qu'une jeune femme s'approche de moi. Je suis obligée d'avouer qu'elle est juste sublime. Je lui prends sa commande comme je le ferais avec n'importe quel client. Elle me remercie et je passe au client d'après. Cependant, je sens un regard sur moi. Je jette de temps à autre un regard à l'inconnue. Elle ne me laisse pas indifférente. Mais il faut que je pense à autre chose. Ici, je suis Willow, l'hétéro en couple depuis quatre ans. La jeune femme me demande où se trouve les toilettes. Je lui indique en essayant de rester naturelle puis me retourne vers les alcools. Je me rends compte qu'on a plus de Martini blanc. Merde. Je file dans le couloir et pousse la porte de la réserve afin d'attraper une bouteille pleine parmi toutes les autres. Quand je sors, je me retrouve nez à nez avec la jolie brune. Je manque de m'étouffer mais je lui offre un joli sourire. « Oh c'est rien. C'est moi qui regardait pas où j'allais. » dis-je en baissant les yeux sur la bouteille de Martini que j'avais entre les mains. « Je travaille ici depuis un moment et je crois bien que c'est la première fois que je vous vois. Je me trompe? » demandais-je en étant un peu trop curieuse. Quand vous bossez dans un bar, il y a toujours "les habitués" mais un visage comme le sien, je m'en serais souvenue.

Je ne m'attendais absolument pas à tomber nez à nez avec la jolie serveuse du bar, juste en sortant des toilettes. Ce n'était l'endroit le plus sexy pour faire connaissance, mais après tout, pourquoi pas ! Le sourire qu'elle m'offre a le don de me faire sourire à nouveau. Ces derniers temps, je n'ai pourtant pas le sourire facile. Je ne sais pas si c'est la vodka que j'ai bu rapidement, ou la chaleur du bar qui fait que je me sens étrangement bien, mais quoi qu'il en soit, c'est plutôt très agréable. Elle s'exuse à son tour et je me mordille la lèvre en la regardant, alors qu'elle me pose une question : « Je travaille ici depuis un moment et je crois bien que c'est la première fois que je vous vois. Je me trompe? » . Un petit sourire en coin, je lui répondais alors : « Oui en fait je viens tout juste d'arriver à Time Square. Je sais même pas comment je vais retrouver mon appart en sortant d'ici ! » Je lâchais un petit rire amusé alors qu'on rappelait la jolie serveuse, du coup, ça me permattait de connaître son prénom : Willow.

Je la suivais et nos chemins se séparaient au moment où elle passait derrière le bar et que je restais devant, tel un pillier de bar ( ). J'attendais qu'elle eut servi le client qui la réclamait, et je lui faisais signe de rappliquer par ici, ce qu'elle fit. Heureusement, le client est roi, sinon pas sûr qu'elle serait venue. Je sentais mes joues rosir, sûrement l'alcool, je n'avais pas l'habitude de boire. « Je peux te redemander la même chose ? ». Elle hochait la tête et repartait me refaire le même cocktail qu'un peu plus tôt. J'espérais simplement que mon tutoiement naturel ne l'ait pas effrayée. C'était mon côté canadien, chez nous on a tendance à tutoyer facilement les gens qui ont le même âge que nous, ou plus jeunes...

Elle m'apportait ma 2ème vodka et je la remerciais chaleureusement alors qu'un homme vint près de moi pour me demander de danser. J'hésitais un moment, regardais ma vodka. J'avais vu plein de films où les mecs mettaient de la drogue dans les verres de femmes pour abuser d'elles, je n'avais pas besoin de ça, du coup j'engloutissais la totalité de mon verre à martini, avec une petite grimace sur la fin, et je secouais la tête en plissant les yeux. « Let's dance !! »

Je prenais la main du jeune homme et allais un peu plus au centre de la pièce pour danser, et de fil en aiguille, je me retrouvais à danser avec une jeune femme, plutôt mignonne mais pas du tout mon goût. L'alcool faisait rapidement effet, surtout après avoir bu pratiquement cul sec mes 2 vodkas. J'étais euphorique et dansais collée serrée avec la fille sans aucune gêne, ce qui faisaient se retrourner tous les mecs à 200 mètres à la ronde. Au bout de 3 chansons, la tête qui tournait légèrement, je revenais m'asseoir à ma place au bar, et cherchais des yeux la jolie Willow.

Comme un peu plus tôt, je me penchais sur le bar, légèrement essouflée, et lui demandais presque à l'oreille un verre d'eau, j'étais assoifée, mais je n'allais pas commander une 3ème vodka où je rentrerai sur les genoux !! « Wouw j'ai la tête qui tourne j'ai pas l'habitude de boire de l'alcool !! ». J lui adressais de nouveau un énorme sourire en me mordillant la lèvre avec mes dents. Certes mon sourire était devenu presque un peu plus charmeur, j'avais envie de m'amuser ce soir, et cette serveuse me plaisait vraiment beaucoup. Alors pourquoi ne pas tenter ma chance. L'alcool déshinibe il parraît !!

Me retrouver dans l'arrière bar avec cette belle inconnue est exactement le genre de situation que j'essaie d'éviter. Non pas qu'elle me fait peur, mais pour des raisons qui paraissent évidentes, je suis pas forcément à l'aise avec la gente féminine. Surtout quand elles sont aussi belles qu'elle. Je préfère les filles, mais c'est plus simple pour moi d'approcher les hommes. Et encore, si je suis dans une relation avec un garçon depuis quatre ans c'est bien pour éviter de devoir draguer ou me laisser draguer. Au moins, avec Luke, je sais que ça bougera pas et que j'aurais pas besoin de me retrouver une "couverture" de si tôt. C'est sûr que c'est pas correcte pour lui qui ressent de sincères sentiments envers moi mais je le considère quand même comme un ami très proche. On se dit - presque - tout et j'aime être en sa présence. Même si j'ai déjà un frère, il pourrait très bien être un deuxième pour moi. Si on ne pense pas aux moments intimes sous la couette bien sur. Rien que d'imaginer ça avec Donovan, j'ai envie de vomir. Je n'ai jamais été touchée par une fille et j'en ai jamais touché une non plus. Il n'y a que les hommes qui ont pu avoir mon corps et des fois, je suis forcée d'avouer que j'aurais envie de goûter au plaisir avec une femme aux belles courbes comme la cliente en face de moi. Ca y'est, mon esprit divague à nouveau.

« Oh je vois! Je vis depuis toujours ici mais on s'habitude très vite aux ruelles. Je ne m'inquiète pas pour vous. Au pire des cas, il y a toujours les taxis! » dis-je en souriant. Je m'étonne moi même de parler aussi facilement. En temps normal, j'évite de trop aligner de mots à la suite, préférant que ça soit les autres qui parlent et moi qui écoute. Très rapidement, j'entends mon prénom. Je tourne la tête et constate que ma collègue me fait signe de revenir derrière le bar. Ici, on peut s'éloigner trente secondes et être sûr de trouver une dizaine de consommateurs qui attendent d'être servis. Je fais une petite moue désolée à l'inconnue et file derrière mon comptoir afin de servir l'homme qui est le plus près.

Je sais que c'est un peu contradictoire de bosser dans un bar quand on est timide et pas forcément sociable mais allez savoir pourquoi, je m'en sors bien ici. Les clients ne cherchent pas trop à parler, du moment que je leur donne leur boisson. Et puis, je les sers toujours avec le sourire. Tout le monde sait qu'un sourire vaut des fois cent fois plus qu'une parole.

Quand mon regard se lève pour chercher l'inconnue des yeux, je la vois en train de me faire signe de devenir vers elle. Elle me demande la même chose qu'avant et même si en temps normal j'aurais demandé à attendre, là je vais tout de suite lui préparer son cocktail melon et vodka. Je retourne derrière le comptoir et me retourne pour accrocher la bouteille de Martini que j'ai été chercher à la réserve tout à l'heure. Discrètement, je jette un nouveau coup d'oeil à l'inconnue. Je ne connais même pas son prénom. Elle dansait avec un homme. Forcément, une fille comme elle doit sûrement avoir une file d'attente longue comme à Disneyland devant chez elle. Et quand je dis "fille comme elle" je veux dire une fille aussi mignonne qu'elle bien sur. Rien d'autre. Je continua de servir les clients qui venaient et sortaient des bières de la glace en les décapsulant à la suite. Comme les guichetière au bureau de poste qui tamponne les enveloppes plus vite que leur ombres.

La jeune femme qui ne me laissait pas indifférente allait sûrement se poser des questions en voyant que je n'arrêtais pas de lancer des regards en sa direction. Non pas que je sois en train de la surveiller, mais simplement que c'est dur de détacher son regard. Sa peau semble parfaite et ses yeux en amande sont vraiment magnifique. Je secoue quelque peu la tête. Je vais me faire remarquer si je continue à la regarder de cette manière. Un coup de chiffon sur le bois plus tard, la voici de retour. Je lâche un petit rire sincère en entendant sa remarque. Personnellement, j'ai beau bosser dans un bar, l'alcool ce n'est pas trop mon truc non plus. Je lui sers le verre d'eau qu'elle m'a demandé et sors des verres pour les mettre sous le comptoir, à portée de main. La manière qu'elle avait de se mordiller la lèvre était assez perturbante. Je détourna le regard pour ne pas fixer sa bouche plus longtemps. « Vous êtes venue seule? » demandais-je intriguée. Je ne parle peut-être pas beaucoup, par contre si j'ouvre la bouche, c'est souvent pour poser des questions. Je suis de nature très curieuse. « Au fait, je ne connais même pas votre prénom! »

Cette fille avait vraiment quelque chose de... non en fait il était impossible de mettre un mot dessus. Elle dégageait un truc assez hallucinant, une présence, un charisme, malgré sa timidité évidente. Me retrouver face à elle me faisait presque perdre mes moyens. Ça ne m'arrivait pas souvent. J'étais plutôt le genre de fille avenante, je n'ai pas peur de me faire de nouveaux amis, de nouvelles connaissances, mais en me retrouvant là à deux pas d'elle tout à l'heure à la sortie des toilettes m'avait procuré un sentiment spécial.

Je n'avais pas tellement eu de vis sociale depuis 4 ans. Il faut dire qu'élever un bébé, ça ne permet pas tellement de sortir pour rencontrer du monde. Mais à choisir, si je devais revenir en arrière et avoir le choix, malgré toutes les souffrances que ça avait provoqué en moi, je crois que je ferai pareil. Avoir eu Lucy dans ma vie, ne serait-ce que 4 ans, avait été un réel bonheur. Et comme m'avait dit Kaleb, il y avait sans doute un recours pour que je la récupère. Je ne savais pas trop si c'était la bonne solution, elle avait peur être besoin de sa mère, même si je doutais fortement du pouvoir maternel de ma propre soeur. Bref, tout ça pour dire que sortir ce soir me faisait un bien fou, je ne pensais pas à ce qui me faisait souffrir, ni même à mon boulot en retard, je ne pensais qu'à ne pas penser, justement.

Après avoir dansé un peu, je sentais ma tête tourner et préférais aller me rasseoir. Et puis c'était un bon prétexte pour retrouver la jolie serveuse. Bon, oui, je devais l'avouer, elle me plaisait bien ! Mais loin de moi l'idée de la draguer, ou du moins, ce n'était pas du tout mon intention, même si mon attitude ou mes regards pouvaient dire le contraire. Elle me servit le verre d'eau que je venais de lui demander et elle me demanda alors « Vous êtes venue seule? ». Un large sourire illumina mon visage. Allez savoir pourquoi . L'alcool sûrement, je n'avais pas trop de quoi sourire, si ce n'est le fait qu'elle me demandait presque si j'étais célibataire. Ou du moins c'est ce que je crus. «Oui ! Je suis arrivée hier après midi, du coup j'ai pas encore trouvé quelqu'un pour m'accompagner boire un verre... mais ça viendra !». Je levais mon verre d'eau en sa direction comme pour trinquer imaginairement avec elle, et engloutis mon verre d'une traite. Oui, danser ça donne soif !

« Au fait, je ne connais même pas votre prénom! ». Oulà. On ne s'emballe pas. Cette fille n'a absolument pas l'air d'être le genre à draguer, alors on ne va pas commencer à traduire ce qu'elle n'a pas dit. Elle me demande simplement mon prénom, ne pas s'emballer. L'alccol faisait vraiment des trucs bizarres dans ma tête. Je lui répondis alors «Eileen !» Mais en voyant la jeune femme plisser des yeux et se rapprocher doucement, je compris qu'elle n'avais pas entendu, à cause du bruit. Je me penchais alors un peu plus, rapprochant ma bouche de son oreille qu'elle me tendait, et je repérais alors «Eileen, je m'appelle Eileen !» Elle se recula alors en m'offrant un sourire à son tour et je lui tendais la main en lui disant «Enchantée !». Et là, même si elle n'avait pas bien entendu, ce n'était pas difficile de deviner. Mais si elle voulait que je me penche une nouvelle fois pour lui parler de nouveau au creux de l'oreille, ce n'était pas pour me déplaire, surtout que j'avais adoré son parfum. Je n'aurai cependant pas osé lui demander ce qu'elle portait comme eau de toilette.

Je jetais un oeil à ma montre, il était déjà pratiquement 2h du mat', je ne savais pas trop à quelle heure fermait le bar mais il se désemplissait doucement. Je me penchais de nouveau un peu plus vers elle, mais pas aussi proche qu'un peu plus tôt, et lui demanda alors «Vous fermez à quelle heure ?». Je commençais tout juste à m'amuser, je n'avais absolument pas envie de partir...

La draguer? Oulà non alors. C'est pas du tout mon genre. Bien au contraire. Ma rencontre avec mon petit ami a été un pur hasard et c'est lui qui a fait tous les premiers pas. Jamais je n'aurais le courage de faire des compliments ouvertement à un homme et encore moins à une femme. Une des raisons pour lesquelles je reste avec Luke, parce que comme ça, je n'ai pas besoin de passer par toutes ces étapes humiliantes que sont les premiers regards, paroles et autre rendez-vous galants. C'est tellement gênant et je pense que je serais capable de me liquéfier devant la personne.

La jeune femme m'explique qu'elle est arrivée hier à Town Square et curieuse comme je suis, je me demande qu'est-ce qui a pu l'amener à venir ici dans l'Oregon. D'ailleurs, je me demande d'où elle vient... Je la verrais bien arriver de New York. Quand j'ai fais mon école dans la grande pomme, j'ai rencontré par mal de personnes comme elle et je sais pas, je ne serais vraiment pas étonnée qu'elle me dise qu'elle vienne de la grande métropole. J'ai envie de lui dire qu'elle n'a pas forcément besoin d'être accompagnée, qu'elle pourrait simplement parler avec la barmaid mais comme toujours, les mots ne passent pas mes lèvres. Je ne suis vraiment pas douée pour avoir ce genre de conversation. Surtout que je ne dois pas éveiller les soupçons sur ma sexualité.

C'est sur que quand on bosse dans un bar, c'est quand même rare de demander le prénom des clients. Ca m'arrive de passer un bon moment avec un jeune homme qui me ferait des blagues et il me dirait spontanément son prénom mais là en l'occurrence, vu comme je suis curieuse je le demande d'office à l'inconnue. Sauf qu'avec la musique et les rires des gens aux alentours, je ne l'entends pas. On est obligé de se parler à quelques centimètres à peine pour que je comprenne finalement qu'elle s'appelle Eileen. Un prénom très joli qui colle très bien à son physique. Mais mise à part son prénom, quelque chose d'autre me frappe, le doux parfum qui me vient aux narines. Je me recule un peu trop brusquement, comme si je m'étais pris une charge électrique pour ne pas rester bête à sentir son parfum. Je suis en train de me faire des idées. Il ne faut pas. La jeune femme tendit une main que je serra en faisant un timide hochement de tête pour lui faire comprendre que moi aussi j'étais enchantée de faire sa connaissance.

Je crois bien qu'elle est la première femme à qui je parle de cette manière. En temps normal, j'évite tout contact avec les femmes. Ce qui fait toujours rire mon frère car étant le seul à connaître mon petit secret, il me dit qu'il y a rien de plus gros pour éveiller des soupçons. Il n'a peut-être pas tord, mais j'ai toujours ma couverture secrète: Luke. Si les gens se mettent à parler dans mon dos, je n'ai qu'à m'afficher avec lui. heureusement, ce n'est jamais arrivé pour l'instant.

J'adore Luke, ne me comprenez pas mal, mais pas de la même manière que lui. Il voudrait qu'on s'installe, qu'on prenne un chat et tout ce qui va avec. J'avoue qu'en quatre ans, ça serait peut-être le moment de passer à l'étape supérieur mais je lui parle toujours de ma situation financière pour m'en sortir avec une pirouette. C'est plus simple.

« Dans une heure! » J'accompagne ma réponse avec un indexe levé pour lui faire comprendre à quelle heure le bar ferme. La soirée aura passé vite finalement. En même temps, j'ai quasiment passé tout mon temps à observer la sublime créature qui est en face de moi tout en servant les clients au bar alors c'est normal que le temps ait passé vite. « Attendez que je termine mon service et si vous voulez je vous montrerais un raccourcis pour rentrer chez vous! » C'est une proposition assez osée mais en même temps, Eileen est sûrement hétérosexuelle donc je ne vois pas pourquoi elle l'interpréterait d'une autre manière que de la gentillesse de ma part.

A ma question rapport à la fermeture du bar, la jeune barmaid me répondit qu'ils fermeraient d'ici une heure environ. Je lui adressais un sourire. Je comptais bien rester jusqu'à la fermeture, à moins que l'ambiance ne s'étouffe avant et que je ne trouve le temps long.
Mais alors que j'étais en plein dans mes rêveries intérieures, Willow me proposa « Attendez que je termine mon service et si vous voulez je vous montrerais un raccourcis pour rentrer chez vous! ». A cet instant, il m'était plutôt difficile (surtout avec l'alcool) de ne rien sous entendre de son invitation. Les signes paraissaient plutôt évidents, mais pourtant je me faisais des idées. Cela dit, si elle avait voulu être plus entreprenante elle aurait pu l'être. Depuis que j'étais arrivée, je n'avais pas donné l'impression d'être inaccessible. Donc si elle avait voulu me faire comprendre que je lui plaisais, elle aurait pu. Or tout ce que j'aurai pu prendre comme étant de la drague, était très certainement la timidité de la demoiselle qui faisait détourner mon imagination.

Pour simple réponde je lui offrais un sourire et hochais la tête à l'affirmative. Je comptais bien rester encore une petite heure, le temps passait très vite, et étant insomniaque, je n'allais pas me coucher de si tôt. Je regardais la jeune femme s'éloigner un peu pour aller servir quelques clients, et en attendant la fermeture, je profitais qu'il y ait encore un peu de monde pour aller danser. Je me déhanchais sur le dancefloor, ça faisait tellement longtemps que je n'avais pas fait ça, finalement, à cet instant précis, je me sentais un peu plus libre.

Quand je revins au bar, Willow avait disparu, une autre jeune femme avait pris sa place pour faire la fermeture. Je me penchais sur le bar interpelant la jeune femme blonde et lui demandais : «Excusez moi, Willow est déjà partie ?» «Elle doit pas être loin, elle vient tout juste de quitter le bar !». Je la remerciais, récupérais ma veste et sortais en trombe en pensant qu'elle était dehors. Mais même s'il y avait du monde dehors, je ne voyais pas le joli minois de Willow. Elle avait dû partir sans m'attendre. J'avoue que j'étais un peu déçue. Je sortais de ma poche un paquet de cigarettes. J'avais arrêté pendant 4 ans, je n'avais pas voulu que ma dépendance à la cigarette nuise à Lucy, mais en la perdant, je m'étais réfugiée dans mon ancienne addiction, pour me changer l'esprit. Je sortais donc une cigarette du paquet et la portais à mes lèvres avant d'entendre une petite voix derrière moi. c'était Willow qui me demandais si je comptais partir sans son guide. «Non c'est moi qui croyais que tu étais partie ! Je me demandais comment j'allais pouvoir rentrer !».

Elle me fit un signe de tête comme pour me dire qu'on pouvait y aller. J'allumais ma cigarette et lui en proposais une en lui tendant le paquet. Je sortais mon téléphone et lui donnais mon adresse pour qu'elle puisse savoir où me guider, et j'ajoutais quand même : «En tout cas c'est super gentil de ta part de m'aider à retrouver mon chez moi, mais je tiens quand même à te dire qu'il fait nuit noire, que j'ai bu 2 vodka, et que je suis pas certaine de me rappeler ce chemin demain... mais au moins je vais rentrer chez moi sans payer un taxi pour faire moins d'un kilomètre !!» Je lâchais un petit rire et marchais près d'elle tout en tirant sur ma cigarette. A moi de satisfaire ma curiosité, je lui posais alors une question, puis plusieurs. «Ça fait longtemps que tu bosses ici ? C'est ton boulot à plein temps ?». On allait marcher un petit moment ensemble, je comptais bien en savoir un peu plus sur cette jolie brune...

Je ne connais pas d'homosexuelles à Town Square, je ne sais pas si y en a beaucoup, ou pas, s'ils sont sympas ou pas. Je n'ai jamais fréquenté des lieux propices pour rencontrer ces personnes étant donné que je vis dans le mensonge. Peut-être que chaque jour je maquille ou sers des jeunes femmes qui sont dans la même situation que moi, qu'elles l'assument ou pas. Je pars donc du principe qu'Eileen est hétérosexuelle et que ma proposition de la raccompagner chez elle pourrait tenir de la simple amitié naissante. Après tout, ce n'est pas parce que je préfère les filles - car oui j'en suis pleinement consciente - que je n'ai pas le droit d'avoir des amies sans ambiguïté non? Surtout que personne ne le sait donc à part voir une preuve de gentillesse je ne "risque" pas grand chose.

Toute la soirée, Eileen m'a lancé des regards et je ne sais pas si je dois y lire des signes ou pas. Elle est tellement jolie et je l'ai vue danser avec un homme alors je pars du principe qu'elle préfère les hommes. Je ne sais pas si je suis dans le juste ou pas mais de toute manière, ça ne change rien au fait que je ne vais pas commencer à m'amouracher d'autres personnes, surtout une fille à cause de Luke.

La jeune femme accepte ma proposition et s'en va de nouveau danser. Je ne peux pas détacher mon regard de son corps qui ondule sur la piste. Elle est juste sublime et très attirante. Je temps à autre, j'essaie de me rappeler qu'il serait facile d'éveiller des soupçons dans ce bar et comme je ne veux pas qu'on se pose des questions à mon sujet, je préfère quitter le bar et demander à ma collègue de fermer à ma place. Je vais me planquer dans la réserve pour essayer de mettre un peu d'ordre et de voir ce qu'il faudra commander à l'ouverture demain soir. Je compte rapidement les bouteilles d'alcools fort avant de faire les boissons telles que le Coca-Cola ou les jus de fruits. Mais j'ai un peu de peine à rester concentrée. Je me sens mal, presque sale de penser à cette fille, cette simple cliente qui a passé la porte du bar ce soir alors que j'ai un petit-ami qui attend que je vienne chez lui demain. Ma conscience semble peser lourd tout d'un coup. J'attrape une bouteille de whisky entamée pour en boire deux gorgées directement au goulot. Juste histoire de me détendre. Pas besoin de plus de toute manière. En plus, je supporte très mal l'alcool.

Quand j'ai terminé l'inventaire, je retire mon tablier et me rends compte que j'ai oublié de prendre un haut de rechange pour éviter de devoir garder mon t-shirt du Fitz. Mais c'est pas grave, j'ai mon blouson de toute manière. Je remonte un peu mon pantalon noir et tire sur mon t-shirt avant d'enfiler ma veste et attraper mon sac pour sortir du bar par la porte des employés. J'attends nerveusement sur le trottoir, les bras croisés et avec l'envie de fuir en courant mais je n'ai pas vraiment le temps de passer le cap car Eileen apparaît dans la rue. Elle sembla me chercher des yeux et en temps normal, j'aurais dû m'avancer directement vers elle pour lui faire part de ma présence mais j'hésite. J'ai encore le temps de tourner les talons et de partir comme une voleuse. Non Willow, vas-y. Je finis par m'avancer vers elle, d'un pas peu assuré. « Tu ne comptais quand même pas partir sans ton guide non? » dis-je la voix tremblante en essayant tout de même de faire de l'humour. Elle m'avoua penser que c'était moi qui suis partie et je suis presque sûre que mes joues deviennent rouge tomate tout d'un coup. J'y ai pensé, justement et j'ai un peu honte.

Eileen me proposa une cigarette, j'en pris une et l'alluma en essayant de contrôler le tremblement de mes doigts puis tire une première bouffée. Elle a le don de me calmer un peu. Vive la nicotine quand même. Je lui rends son paquet et on se met en route. Je trouve qu'elle marche très près de moi mais je ne suis pas contre alors à part tirer sur ma cigarette, je ne fais rien de plus. J'ai tellement honte que j'aimerais que le sol s'ouvre sous mes pieds. La voix de la jeune femme brise le silence de la nuit et j'avoue que ça fait du bien. « C'est pas un problème. Quand j'étais nouvelle à New York, j'aurais aimé que quelqu'un veuille bien m'accompagner du métro à chez moi pour éviter de me perdre. » dis-je avec un sourire sur les lèvres. Cette fois, c'est Eileen qui pose les questions. Je tire une nouvelle bouffée de fumée avant de croiser mon bras droit sous mon gauche. « Ca fait plusieurs mois oui mais je ne bosse qu'un soir sur deux. Je suis maquilleuse en temps normal. Et toi? Tu es venue à Town Square pour la beauté du paysage ou parce que tu as de la famille? »

Ma tête tournait légèrement. J'avais été plus alcoolisée que ça (rarement je l'avoue), mais j'avais quand même été plus sobre que ça. Je détestais être ivre, 2 verres c'était la limite pour mon petit corps frêle, avant de tituber et dire n'importe quoi. Mais avec 2 verres de vodka, on a quand même le rire facile, et la déshinibition qui va avec...

Je venais de trouver Willow, la charmante barmaid, qui devait m'aider à retrouver mon chemin. Après lui avoir offert une cigarette et donné mon adresse, on se mettait en chemin. Je lui avouais alors que j'avais peur de ne pas me souvenir de son raccourci, et elle m'avoua à son tour qu'elle aurait aimé avoir quelqu'un qui la guide quand elle avait habité New York. Alors elle avait habité la grande pomme. Elle paraissait jeune pourtant, enfin, mon âge quoi, à quelque chose près. Mais cela dit, ça n'empêche pas quand on a 25 ans d'avoir vécu beaucoup de choses. J'essayais cependant de ne faire aucun rapprochement avec mon histoire, j'étais venue ici pour justement ne pas y penser.

Pour ne pas laisser de place à un silence froid et une timidité palpable chez l'une comme chez l'autre, je me lançais à lui poser quelques question, ce à quoi elle me répondait tout naturellement « Ça fait plusieurs mois oui mais je ne bosse qu'un soir sur deux. Je suis maquilleuse en temps normal. » Elle était maquilleuse ? C'était un métier très intéressant, prenant aussi je suppose, rares sont les personnes qui "atterrissent" dans ce métier par hasard, c'est généralement une vocation. Elle avait donc assez de tempérament pour assumer ces choix. Enfin, c'est ce que je pensais, mais finalement, pas sur tous les points ! Je lui souriais et haussais les sourcils d'un air surprise, mais agréablement, par ce qu'elle venait de m'avouer. «Maquilleuse ! C'est original comme métier... t'es une artiste quoi !». Je lâchais un petit rire et enfournais en même temps mes mains dans mes poches, haussant les épaules pour me tenir chaud. On avait beau être au printemps, la fraîcheur tombait le soir.

A elle à présent de me poser une question, plutôt personnelle, bien qu'elle n'y paraissait pas.
«Et toi? Tu es venue à Town Square pour la beauté du paysage ou parce que tu as de la famille? ». Oui Town Square avait l'air d'être une jolie ville, tout ce dont on peut rêver pour vivre, travailler, fonder une famille... je n'avais pas encore eu le temps de trop m'y pencher, mais ça ne tarderait pas. Cependant, j'aurai préféré y venir pour la beauté du paysage, ou pour la famille. Je me refermais un peu à sa question, qui pourtant ne se voulait pas si intrusive. «Euh... non. En fait, j'ai voulu changer de vie. C'est un concours de circonstance. J'habitai à Ottawa et j'ai rencontré un vieil homme qui avait un appartement ici, et qui voulait le louer. Alors j'ai sauté sur l'occas... je crois qu'il y a des périodes comme ça où on a besoin de passer à autre chose, voir de nouvelles têtes... tout ça quoi...» Je restais quelque peu évasive. Pas que je ne voulais pas parler de mon histoire avec Willow, mais simplement que j'avais décidé ce soir de ne pas broyer du noir, je préférais parler d'autre chose.

«En tout cas j'suis super contente d'avoir atterri ici ! C'est vraiment super mignon, j'vais pouvoir bosser au calme, et puis ça fait même pas 2 jours que j'suis là et j'ai déjà rencontré des gens supers...» Je m'étais retournée pour être face à elle, et je marchais donc à reculons pendant qu'elle marchait normalement, et je lui adressais un large sourire. «On est encore loin ? En plus j'suis indisciplinée je regarde même pas le chemin !» Un petit rire enfantin s'échappa de mes lèvres juste avant que je ne trébuche sur quelque chose, me retrouvant alors les fesses à même le sol. J'éclatais de rire gaiement (pardon pour le jeu de mot) et lâchais alors «C'est pas à toi que je peux mentir en disant que je n'ai rien bu ! Enfin c'est pas 2 vodka qui me foutraient par terre...» Et c'est à ce moment là que je découvrais ce qui m'avait fait trébucher, un petit chien noir, je n'arrivais pas très bien à déceler la race, il avait l'air apeuré, là tout seul sur le bord du trottoir. Je lançais un regard à Willow et prenais la main qu'elle me tendait pour me relever. Je frottais mon jean pour retirer l'éventuelle saleté dûe à ma chute, et reposais mes yeux sur le petit chien. «Ça court les rues les chiens errants ici ?». J'étais plutôt étonnée, mais visiblement je n'étais pas la seule. Sauf que ce chien était vraiment trop mignon...

A voir et écouter Eileen, l'alcool la rendait joyeuse et légère. Je préfère ça que les gens qui deviennent agressif. Malheureusement, c'est arrivé plus d'une fois qu'il y ait des bagarre au bar à cause d'un homme qui avait l'alcool méchant une fois qu'il avait dépassé le stade des quatre whisky. Au moins, la jeune femme semblait contente et pas vraiment apeurée de marcher avec une inconnue dans les ruelles sombres de Town Square. On ne risque pas grand chose par ici, il y a rarement des problèmes mais il vaut mieux ne pas crier au diable non plus. Je ne sais pas si en étant sobre, Eileen aurait accepté que quelqu'un lui montre un raccourcis pour rentrer chez elle. Malgré mon stress évident, l'air frais me faisait du bien ainsi que la clope où je continuais d'aspirer quelques bouffées.

Il n'y a pas un bruit dans le quartier. La seule chose qu'on entend ce sont nos pas sur le bitume ainsi que nos voix qui parlent de tout et de rien. Je crois bien qu'on est en train de faire connaissance et plus Eileen parle, plus j'apprécie sa présence. Elle semble être une jeune femme simple mais avec une sacrée force de caractère. Certainement davantage que moi. La scène de la jeune femme en train de danser avec une autre me revient à l'esprit. Elle a aussi dansé avec un homme, donc ça ne veut rien dire... Je suis en train de me mélanger les pinceaux dans mon propre cerveau alors pour éviter la prises de tête plus longtemps, je me vide l'esprit et revient sur le moment présent. La jeune femme s'exclame que le métier de maquilleuse doit être original. Elle me qualifie même d'artiste et je lâche un rire cristallin. Je n'irais pas jusque là. Disons que c'est un monde quand même très superficiel mais enrichissant en même temps. J'ai beau préférer les filles, ça ne m'empêche pas d'être féminine et d'aimer tout ce qui touche à la mode et au maquillage. La preuve, quand je maquillais pour Balenciaga, j'étais comme une petite fille à Noël. Même si je me suis fait engueulée une fois parce que j'ai proposé un sandwich à une mannequin. « C'est vrai que c'est original. Peut-être trop pour une ville comme Town Square d'ailleurs. » avouais-je à regret. A New York, je passais mes journées et mes nuits sur les défilés ou les plateaux de télévision. Ici, je travaille pour deux photographes et la télé locale. Pas pour rien que j'ai dû me trouver ce job au Fitzgerald.

J'en arrive à questionner Eileen car même si parler de mon métier ne me gêne pas, j'ai aussi envie d'en apprendre sur elle, son passé et pourquoi elle est nouvelle dans notre jolie petite ville. La jeune femme reste assez évasive sur les raisons de son déménagement ici mais je n'en demande pas plus. Trop curieuse comme toujours, je finis par me rendre compte que j'aurais dû tourner ma langue sept fois dans ma bouche avant de parler. On a tous nos démons, un passé à fuir. C'est peut-être le cas d'Eileen, j'en sais rien.

La belle inconnue - plus si inconnue que ça - marche à reculons en continuant de parler. Apparemment elle se sent bien ici et c'est ce qui compte après tout. Notre petite ville n'est pas des plus paradisiaque mais les habitants sont chaleureux et c'est paisible. Je n'ai pas le temps de répondre à la question d'Eileen que celle-ci trébuche et tombe les fesses par terre. J'ai le réflexe de m'arrêter juste avant que je ne tombe aussi sur elle et lui tend un bras pour l'aider à se relever. Je baisse les yeux à terre pour voir l'origine de sa chute et lâche un "ohhh" admiratif en découvrant un petit chien noir couché par terre, complètement affolé. C'est bien la première fois que je vois un chiot errant dans les rues de Town Square. On a davantage l'habitude de voir des chats, mais pas des chiens. Sans plus vraiment écouter la jeune femme, je m'accroupis et attrape la petite bête dans mes bras. Il tremble et je le sens tout maigre sous mes doigts. « Pauvre petit bout... » Le chiot s'accroche à mon blouson et se redresse pour aller renifler mon oreille. Son souffle me chatouille et m'arrache un rire un peu enfantin. Mon regard se pose sur Eileen. « Ca t'embête si je monte chez toi pour voir qu'il n'ait rien? » Deuxième intrusion dans sa vie personnelle ce soir. Bravo Willow, de mieux en mieux. Je fais taire ma conscience et fait un mouvement de tête vers l'immeuble derrière la jeune femme. « Car si je suis juste, on est arrivées. »

A peine le temps de comprendre ce qui m'a fait trébucher, que déjà Willow se précipitait sur la petite boule de poil, pour la prendre dans ses bras. Les lampadaires n'éclairaient pas assez la rue pour nous permettre d'en voir d'avantage. Il était vraiment petit, il n'avait pas l'air très vieux. Je me rapprochais de Willow pour caresser le chien alors qu'elle relevait la tête me demandant « Ça t'embête si je monte chez toi pour voir qu'il n'ait rien? ». Je secouais la tête pour lui dire qu'évidemment, ça ne m'embêtais pas. Elle ajoutait « Car si je suis juste, on est arrivées. » Je me retournais et reconnaissais mon immeuble, avant de refaire face à Willow. «Oui bien sûr monte !». Je sortais mes clefs de ma poche et on montait toutes les deux dans l'ascenseur. La lumière nous permettait de mieux voir la petite boule de poil. Un petit bouledogue français tout noir, il était magnifique. Il devait avoir quelque chose comme 5 ou 6 mois. Il devait appartenir à quelqu'un, je ne voyais pas comment un chien pareil aurait pu se fondre dans la nature. Il était quand même bien mince, mais tellement à croquer. J'avais toujours adoré les animaux, et en particulier les chiens. Mais à cause de mon problème pulmonaire, je n'en avais pas le droit, et quand j'aurai pu en avoir le droit, les circonstances ont fait que je n'en ai jamais eu l'occasion...

On arrivait rapidement à l'étage où se trouvait mon appartement, que j'ouvrais pour laisser entrer Willow et le petit chiot. Je ne savais pas trop comment m'y prendre, elle avait l'air d'en connaître plus que moi. Cela dit, je ne le lâchais pas des yeux, il était vraiment trop mignon, même s'il me faisait un peu de peine, il était vraiment tout mince. Je retirais ma veste et partais dans la cuisine «Je vais lui trouver un truc à manger...». Willow quant à elle restait dans le salon et l'auscultait sous toutes ses coutures. Je revenais avec un bol d'eau et des knakies, ça ferait l'affaire. «Tu crois qu'il va bien ? Enfin je dis il, je sais pas si c'est un mâle ou une femelle ?» Elle me répondait que c'était un petit mâle, et que malgré qu'il soit un peu maigrichon, il avait l'air d'aller bien. J'étais un peu rassuré. Elle le posait par terre et le laissait grignoter les petites saucisses que je venais de lui apporter. «Tu crois qu'il faut que je l'amène chez le veto demain pour voir s'il va bien, et s'il a un propriétaire ?». Je m'accroupissais pour lui faire une nouvelle fois des caresses, je craquais complètement pour cette boule de poil.

Willow aussi s'était accroupie pour lui faire des caresses, elle avait l'air de vraiment adorer les animaux. Ça nous faisait un joli point commun. Je relevais le regard vers elle et lui demandais alors «Tu... tu veux le garder ?». A vrai dire, j'avais posé cette question parce que je sentais bien qu'elle craquait elle aussi pour le petit chiot, mais tout au fond de moi j'espérais quand même pouvoir le garder, même si je me doutais qu'il appartenait à quelqu'un. Ou alors on aurait pu faire une garde alternée !! Bon ok là je m'emportais totalement. Mais ce chiot était un peu comme une révélation. Et si je ne pouvais pas le garder, je pensais sérieusement à m'en acheter un. Il avalait ses saucisses avec envie et on l'entendait même faire un petit grognement de plaisir comme s'il ronronnait.

Je me relevais et proposais à Willow «Tu veux boire quelque chose ?». Elle relevait les yeux vers moi et à cet instant précis, je ressentais quelque chose d'assez étrange. Son regard à la fois perçant, la proximité crée par ce chien, la situation faisait que je me sentais étrangement bien à cet instant précis. J'esquissais un sourire devant un bonheur naissant.

Je ne sais pas ce qu'il m'a pris de lui demander si je pouvais monter chez elle. C'est mal élevé et très déplacé quand on ne connaît la personne que depuis quelques heures à peine. Même si le courant passe bien entre nous. Néanmoins, Eileen accepte. Je mets en avant la santé du petit chiot pour essayer de faire passer la pilule car même si je suis de nature très curieuse, je ne me serais jamais invitée de cette manière chez la jeune femme. Et puis ici dans la ruelle, il fait trop sombre pour pouvoir y voir quoi que ce soit. En plus, le chiot est de couleur noire. Alors inutile de dire que c'est mission impossible.

J'affectionne beaucoup les animaux. A New York, un mannequin m'avait refilé son chihuahua parce qu'elle n'avait pas le temps de s'en occuper avec les séances photos et les défilés. J'avoue que c'est pas vraiment mon genre de chien mais il était adorable. Je l'ai trainé avec moi partout, sur tous les plateaux télé où j'allais maquiller. Je l'avais surnommé Marley. En hommage à Bob bien sur. Je suis une grande fane de reggae. Enfin bref. Tout ça pour dire que ce petit bouledogue français me fait de la peine et avant de courir chez le vétérinaire comme une mère angoissée, je préfère jeter un oeil à l'animal d'abord. Quand on arriva à l'étage de son appartement, Eileen ouvrit une porte et me laissa entrer. Je ne fis pas trop attention à ce qu'il y avait autour de moi. Après tout, je ne suis pas chez moi et je pense que je me sentirais mal à l'aise que quelqu'un épie ma décoration ou les meubles qu'on possède avec mon frère. Enfin bref. La jeune femme m'annonça qu'elle allait chercher de quoi manger pour notre petit protégé. Je m'installa sur le canapé et coucha le bouledogue sur le dos, sur mes genoux. Les chiens détestent cette position quand ils ne sont pas confiance mais lui, il se laisse faire. Ce qui me fait complètement craquer. Le chiot semble très intéressé tout d'un coup. Je le vois renifler l'air et c'est quand je vois Eileen arriver avec les petites saucisses que je comprends tout. Je lâche un petit rire. « C'est un petit mâle. Il a l'air d'être en bonne santé à part qu'il a faim et qu'il meurt de froid. » Dieu sait depuis combien de temps il est dehors. Je pose le petit chiot à terre, devant le bol de saucisse et celui-ci commence à mastiquer comme si on venait de lui donner un steak tartare de six cent grammes. Je rigole. Il est trop mignon et ça fait plaisir de le voir manger de bon appétit. Je me tourne vers Eileen et hausse les épaules. « Il a pas l'air d'avoir un microtchip mais tu peux quand même l'emmener. A mon avis, il n'est à personne. Sa maman a dû mettre bas quelque part et les chiots se sont enfuis. »

Sans gêne, je m'accroupis sur le tapis et commença à faire des gratouilles au chiot. Il semblait manquer d'affection. La question d'Eileen me fit sourire. Je mourrais d'envie de le garder, mais avec moi il ne serait pas heureux et puis je vois bien que la jeune femme n'attend qu'une seule chose; que je lui dise de le garder. « Non garde le. J'ai des horaires trop merdiques pour qu'il soit heureux. Et mon frère me tuerait. » dis-je en souriant de plus belle. Le petit bouledogue se couche à plat ventre, le nez dans le bol de saucisses. « Il se prend pour César! » dis-je en le pointant du doigt, amusée. A l'époque des romains, les gens mangeaient coucher. Petite pause culturelle terminée. La voix de ma nouvelle amie se fait à nouveau entendre dans la pièce. Elle me demandais si je voulais quelque chose à boire et machinalement, je lève mon regard vers elle. Un courant électrique m'envahit mais pour ne pas flancher, je préfère l'ignorer. « Je... veux bien un verre d'eau s'il te plaît. » La jeune femme tourna les talons et je me surpris à observer sa silhouette de dos. Elle est vraiment sublime. Je me secoue la tête et baisse le regard vers le chiot qui me regarde bizarrement. A croire qu'il a compris ce que je venais de faire. Je lui gratouille la tête et me racle un peu la gorge. « Sinon... Tu as quelqu'un dans ta vie? Ou avec le déménagement c'est trop compliqué? » demandais-je cash.

Mon sourire s'élargit quand elle me dit que je peux le garder. Et puis, je suis rassurée qu'elle me dise qu'il ne doit être à personne. Mine de rien, on s'attache rapidement à ces petites bestioles. « Non garde le. J'ai des horaires trop merdiques pour qu'il soit heureux. Et mon frère me tuerait. ». Je fronçais légèrement les sourcils en la regardant, toujours accroupie près d'elle à caresser le chiot. «Tu vis avec ton frère ?». Après tout, chacun sa conception de la vie. On a tous une histoire différente et je ne doutais pas qu'il y ait une bonne raison à cela. Elle changeait rapidement de sujet et je foutais gentiment du chien qui mangeait la fin de ses saucisses allongé sur le ventre, la tête dans l'assiette. Je lâchais un rire à la blague de Willow et je relevais la tête avec un large sourire. «Alors il s’appellera Jules !» dis-je avec l'accent français. (Et non "djoulss" comme le prononceraient les américains).

Je me levais alors pour aller nous chercher quelque chose à boire, mais c'est en croisant son regard que je me rendais compte que quelque chose venait de se passer. Je ne savais pas trop si ça n'avait eu lieu qu'en moi, ou si c'était réciproque. Toujours est-il que je préférais ne pas espérer quoi que ce soit. J'avais bu un peu, sans doute que mes sens s'en trouvaient chamboulés. Je me contentais alors d'hocher la tête avec un mini sourire, avant de me retourner pour aller nous chercher 2 verres d'eau. Heureusement que l'appartement était tout meublé et équipé, j'aurai eu un peu de mal sinon. Je cherchais encore mes marques et ouvrais tous les placards avant de trouver ce que je voulais. Je nous remplissais 2 grands verres d'eau et revenais vers Willow, au moment où elle me posait la question fatidique « Sinon... Tu as quelqu'un dans ta vie? Ou avec le déménagement c'est trop compliqué? » . Je m'arrêtais net une seconde, ne lâchant pas le regard de la jeune femme. Je grimaçais un peu (mais une grimace mignonne), et reprenais ma marche vers elle, et après lui avoir donné son verre et m'être assise sur le canapé, je répondais à sa question. «C'est même encore plus compliqué qu'un déménagement ! Mais... non, j'ai personne dans ma vie. Depuis un bail d'ailleurs !» Je lâchais un petit sourire, et me sentant mal à l'aise, je préférais engloutir mon verre d'eau carrément d'une traite. Un petit silence s'installait avant que je ne le brise en lui demandant à mon tour. «Et toi ? Quelqu'un partage ta vie ? A part ton frère ?». J'agrémentais ma question d'un petit sourire bienveillant. Remarque, une aussi jolie fille qu'elle ne pouvait être qu'en couple. Mais j'aurai bien aimé savoir quand même si j'avais vu juste en la sentant homo. Après tous, mes sens n'étaient pas toujours justes... C'est d'ailleurs ce que j'allais me rendre compte assez rapidement quand elle m'avoua qu'elle avait effectivement quelqu'un dans sa vie, et que c'était un homme.

J'essayais de ne pas perdre mon sourire, ça aurait été trop flag de montrer que j'étais un peu déçue. «Mais... ça fait longtemps que vous êtes ensemble ? Si vous vivez pas ensemble ?» Je sentais qu'elle hésitait à répondre et me ravisais «Non excuse moi je suis trop curieuse ça me regarde pas...». Jules se mettait sur ses pattes arrière pour essayer de monter sur le canapé mais il était un peu trop petit pour le faire tout seul alors je me penchais pour le récupérer dans mes bras et le poser sur mes genoux. Et sous mes carresses, il ne mit pas longtemps avant de s'endormir, dans la même position qu'un chat. Je posais mes yeux sur lui et craquais complètement. «Je crois que je vais être une maman gâteau !». Je l'avais déjà été avec Lucy pendant 4 ans, j'allais sûrement déverser mon trop plein d'amour sur cette petite bête à poils...

En général, les gens sont tous surpris d'apprendre que je vis encore avec mon frère. C'est vrai qu'à vingt quatre ans, il serait temps que j'aie mon propre appartement mais depuis la mort de maman, mon frère est encore plus collant qu'avant. Et puis faut dire que je gagne pas assez ma vie pour vivre seule. « Oui effectivement. » dis-je simplement. Pas besoin de m'étaler là-dessus. J'ai pas envie de devoir expliquer toute l'histoire à Eileen bien que je lui fasse assez confiance pour me confier. C'est juste de la paresse et même si on se remet gentiment de la mort de maman, ça reste assez dur d'en parler. Il ne reste plus que nous deux, plus que mon frère et moi. On est notre propre famille.

Suite à ma blague un peu pourrie, Eileen sourit et décida d'aller le petit bouledogue français Jules. C'est mignon et c'est vrai que ça lui va bien. Moi j'aurais été du genre à l'appeler Hendrix ou Lennon en hommage à des grands chanteurs. Je ne peux m'empêcher de me remarquer que son accent français est juste hyper sexy mais heureusement, Jules grogne et ça me ramène sur terre avant que mon esprit ne divague trop.

Je vois bien que je mets les pieds dans le plat en demandant cash à Eileen si elle est amoureuse ou pas. Après tout, elle vit seule et elle a passé la soirée à danser collé serré avec des inconnus. Je me doute un peu de sa réponse mais je veux quand même être sûre. Une fois de plus, les mots sortent de ma bouche sans avoir passé par le philtre. J'ai de la peine avec le tact et il faudrait que je pense à m'en acheter un jour si j'en trouve en magasin. Elle marque un temps d'arrête, tenant les deux verres d'eau dans ses mains. Je me sens bête et j'ai envie de partir en courant tant mon manque de délicatesse est consternant. Je ne me doute pas forcément que les gens puissent avoir des problèmes de coeur et avoir de la peine à s'en remettre. Je suis avec quelqu'un - que je n'aime pas, soit - depuis très longtemps donc je n'ai pas eu de coeur brisé depuis longtemps. Mais en voyant la réaction d'Eileen, je me rends compte que c'est sûrement son cas et elle me le confirme en me disant que c'est même encore plus compliqué qu'un déménagement. Je grimace et baisse la tête, un peu honteuse. Je fixe mon verre d'eau entre mes mains et ne sait plus quoi dire. Si bien qu'un silence gênant s'installe. Silence qu'Eileen brise une fois de plus avec sa jolie voix pour me retourner la question. Je me racle la gorge et remet nerveusement une mèche de cheveux derrière mon oreille. « Hum oui. J'ai quelqu'un. Il s'appelle Dylan. » Le pauvre d'ailleurs. Il ne se doute pas que je suis sur le canapé d'une jeune femme avec pour seule envie; lui sauter dessus. J'ai l'impression de lire un peu de déception sur le visage d'Eileen. Je fronce un peu les sourcils avant de boire une gorgée de mon verre d'eau. Elle continue à me questionner autour de mon petit ami et j'ai l'impression de m'enfoncer dans le canapé tant je suis mal à l'aise. Elle s'excuse d'être aussi curieuse et je fais un mouvement de main pour lui faire comprendre que c'est pas grave. « T'inquiète pas. C'est juste que chez moi aussi... C'est plus compliqué qu'un déménagement. » dis-je en faisant allusion à ce qu'elle m'avait donné comme réponse avec un petit sourire taquin.

Eileen prit Jules entre ses petites mains et le posa sur ses genoux. La scène était vraiment trop adorable. « Je suis sûre qu'il sera heureux avec toi. » Je souris tendrement et plonge mon regard dans celui d'Eileen. Elle me fait un de ses effets.

Spoiler:

J'étais un peu mal à l'aise de lui poser ce genre de questions. Je n'aurai sûrement pas dû. Mais ma curiosité me rattrappait bien souvent, et j'avais du mal à la retenir avant qu'elle n'aille trop loin. Elle me répondit alors « T'inquiète pas. C'est juste que chez moi aussi... C'est plus compliqué qu'un déménagement. » ce qui évidemment, me fit sourire. Je crois qu'aucune histoire d'amour n'est facile à appréhender. Il y a toujours quelque part quelque chose qui ne va pas, qui s'arrange ou non. Aucune histoire d'amour est parfaite en tous points. Mais je n'enviais pas moins les gens qui étaient amoureux. Je ne comptais pas demander à Willow si c'était son cas. Pour une fois, je tournais ma langue dans ma bouche avant de demander ce genre de chose, qui met plus mal à l'aise qu'autre chose.

Je continuais de câliner Jules, je pensais déjà à aller lui acheter tout plein de choses demain. « Je suis sûre qu'il sera heureux avec toi. » Je relevais le regard vers elle et me noyais carrément dans ses grands yeux noirs. Faille spatio-temporelle. Il se passait réellement quelque chose entre nous, mais impossible de dire si c'était dû à l'heure, à l'alcool qui naviguait dans mon sang, ou si tout simplement il se passait quelque chose, réellement. Je baissais le regard un peu gênée, elle avait quelqu'un dans sa vie, ça ne servait à rien que j'imagine quelque chose.

C'est au moment où quelqu'un frappa à la porte que je sursautais, et sortais de mes rêveries. Je regardais l'heure, mon coeur se mit à battre. Il était presque 3h du matin, qui pouvait bien frapper à ma porte à cette heure. Je regardais Willow un peu abasourdie, mais rapidement Jules se leva du canapé pour aller renifler à la porte. Il aboya avec sa petite voix de bébé et je lui disais «Chuuut...» tout bas pour qu'il se taise. Et puis j'entendis derrière la porte une voix d'homme : «Eileen ! C'est Kaleb... j'ai entendu du bruit j'me suis dit que tu dormais pas ! Tout va bien ?». Un peu surprise, je me levais du canapé, récupérais mon chien pour éviter qu'il n'attaque Kaleb, et j'ouvrais la porte, Jules dans mes bras. «Oh, j'savais pas que t'avais un chien !» «C'est récent ! Tu voulais quelque chose ?» «Non c'est juste que j'entendais du bruit je voulais être sûr que tout allait bien !» J'hochais la tête, et Kaleb posais son regard sur Willow. «Ah ok tu n'es pas seule... je vais pas te déranger alors... bonne nuit !» Je lui adressais un petit sourire gentil et refermais la porte à clefs derrière lui. J'étais un peu surprise qu'il frappe comme ça en plein milieu de la nuit. Je reposais Jules à terre et il allait direct vers Willow pour grimper sur ses genoux.

Je les rejoignais tous les deux et dis à Willow tout bas «Je crois qu'il a un peu craqué sur moi !» Elle avait l'air d'être d'accord. «Oui enfin c'qu'il sait pas , c'est que les mecs, j'ai donné... j'suis passée à autre chose depuis... !» Je haussais les épaules. Parler de ça ne me dérangeait pas. Je ne me sentais vraiment ni homo ni hétéro, juste en ce moment j'avais plutôt envie d'avoir une histoire tendre et romantique avec une fille, plutôt que compliquée avec un mec. Je me levais rapidement et allais me chercher de nouveau un verre d'eau. J'avais une soif de malade. De la cuisine je demandais à Willow «Ton frère s'inquiète pas trop quand tu rentres tard comme ça ? C'est un petit frère ou un grand frère ?». J'ouvrais le robinet d'eau et il me restait dans les mains, faisant gicler de l'eau partout. Je lâchais un cri de surprise avant d'éclater de rire. Willow me rejoignait pour m'aider pendant que Jules se cachait sous le canapé. J'étais complètement trempée. Je bouchais le robinet avec mon doigt, et demandais à Willow «Tiens, tu veux bien essayer de le boucher à ma place, je vais aller éteindre carrément l'arrivée d'eau !». Elle venait alors poser son doigt là où il y avait le mien, et nos mains se frôlaient. Je lui jetais un regard gêné avant de baisser mes yeux. Je me retournais rapidement et allais dans la salle de bain pour aller arrêter l'eau, et revenais dans la cuisine. «Enlève ta main pour voir ?». Ça ne fuyait plus. Ouf. J'avais plus qu'à appeler le plombier demain matin, et éponger l’inondation dans la cuisine. J'avais pas fini ! Je replaçais une mèche de cheveux trempés derrière mon oreille et baissais les yeux sur mon t-shirt blanc tout trempé qui était devenu carrément transparent. Oops !

J'aimerais tellement que les choses soient plus simples dans ma vie. J'aimerais pouvoir dire être cent pour cent hétérosexuelle et vivre une belle relation avec mon petit ami, sans prise de tête. Le pauvre n'attend qu'une chose; qu'on emménage ensembles mais ça fait des mois et des mois que je trouve des excuses bidons pour ne pas passer cette étape. Je l'adore, je le considère comme mon meilleur ami et c'est ça le problème. Je ne pense pas pouvoir me lever tous les jours à ses côtés et à le regarder sans être rongée par la culpabilité. Je m'en veux de lui faire croire que je suis amoureuse de lui, de faire des sorties avec lui et ses potes - bien que je ne les aime pas trop - ou encore de rigoler un moment devant la télé avant d'aller se faire des câlins sous la couette. Ma conscience commence à peser lourd et le fait d'avoir rencontrer Eileen n'allait vraiment pas aider. Je ne peux pas nier qu'elle me plaît. Elle est belle et son corps est sensuel. En plus de ça, niveau personnalité, elle est drôle, attachante, douce... Je devrais finir en enfer pour avoir des pensées pareilles alors que demain même j'ai promis à Luke qu'on irait se balader un peu les deux. Toute cette soirée n'est qu'une monstrueuse erreur. Je n'aurais jamais dû parler avec Eileen.

Heureusement, sauvée par le gong, quelqu'un frappe à sa porte. C'est étonnant quand même à une heure pareille au milieu de la nuit. J'essaie de ne pas trop faire ma curieuse mais je jette quand même un oeil à la personne qui a toqué. Un homme. Il parle un peu avec la jeune femme et me jette un regard. Je me sens virer au rouge et baisse la tête vers Jules qui revient en courant vers moi quand sa nouvelle maitresse a fermé la porte. Le chiot monta sur mes genoux et je lui offris des gratouilles derrière les oreilles. Il est clair que ce voisin semble avoir le béguin pour Eileen et j'en suis presque jalouse. Sauf que la suite de la discussion me surprend. J'essaie néanmoins d'agir normalement, comme si le fait qu'elle me dise avec un sous entendu qu'elle préfère les filles en ce moment ne me faisait rien. Alors qu'en réalité, je crois bien que mon coeur vient de descendre dans mes chevilles. Je fais un simple hochement de tête pour affirmer ce qu'elle vient de dire.

Eileen ne tient pas en place. Elle se relève et part dans la cuisine, d'où elle me demande si mon frère ne va pas trop s'inquiéter de ne pas me voir rentrer. « Non, mon grand frère est policier et cette nuit il était de garde alors de toute manière, il n'est pas à la maison. » Ca peut être très pratique d'avoir un frère dans la police, mais d'un autre côté, il a tendance à oublier qu'à la maison, il n'est pas en uniforme et donc qu'il devrait davantage agir comme mon frère quand on est que les deux. Je lui souris mais la suite des événements se passent à une vitesse folle. Tout d'un coup, un jet d'eau de Genève se produit dans la cuisine d'Eileen. Précipitamment, je pose Jules sur le canapé - ne sachant pas si sa nouvelle maman était d'accord avec ça - et je traverse la pièce pour aller me mettre à côté de mon amie, prenant sa place en essayant de bouger le robinet. Mais rien n'y fait. On se retrouve toutes les deux complètement trempées. La jeune femme fille couper l'arrivée d'eau et je pousse un soupir de soulagement, les cheveux dégoulinant devant mes yeux. Peu glamour. Je retire ma main du robinet et plus d'eau ne coule. Eileen baissa son regard sur son t-shirt blanc et j'en fis de même avant de vite détourner le regard en croisant les bras sur ma poitrine. Je suis habillée de noir, heureusement. Je me mets à greloter car évidemment, c'est l'arrivée d'eau froide qui a pété. La jolie brune me propose gentiment de me prêter un t-shirt et s'en va par une porte qui doit être sa chambre. Je la suis du regard et l'entend me parler depuis la pièce mais comme je n'entends rien, je m'approche et la découvre entrain de se changer. Une nouvelle fois, je détourne le regard. Elle me demandait simplement si je préférais un t-shirt ou un pull. « Un pull s'il te plaît... » Je me passe nerveusement une main dans mes cheveux mouillés puis jette un dernier discret regard à son dos nu. Une vague de frisson m'envahit. Elle finit de se changer et m'envoie un pull à capuche gris. Gênée comme pas possible, je retire vite mon t-shirt noir trempé. Même mon soutient gorge est humide et c'est certainement le meilleur moyen de tomber malade. Je me retourne et dégrafe mon sous vêtement avant d'enfiler précipitamment le pull à capuche. « Merci pour le pull... »

Je retourne d'un pas assez rapide au salon et m'asseye dans le canapé, repliant mes jambes contre ma poitrine pour me réchauffer. « Ton appartement est sympa mais ça manque d'une cheminée! » dis-je en essayant de détendre l'atmosphère. Je baisse le regard sur mes manches et soupire. Quand Eileen me rejoint, j'ai l'impression que c'est le moment de lui poser LA question. « Dis... Si tu ne veux pas me répondre je comprendrais mais... Par rapport à ce que tu as dit tout à l'heure... Je me demandais... » Arrête de bafouiller et va droit au but. « Comment tu gères le fait d'avoir "passé à autre chose" tout le jours? » Mes joues devinrent rouges tomate.

Je ne suis pas hyper-active, mais presque. Disons que le fait d'être insomniaque, ça doit jouer un peu. Mais on m'a toujours dit qu'il fallait que je me dépense, surtout depuis ma greffe de poumons. Et depuis, je ne tiens réellement plus en place, il faut que je bouge, tout le temps. Ça ne m'empêche pas d'être calme et douce, et de savoir me poser pour écouter, mais j'ai des moment comme ça, surtout quand je suis en compagnie d'une personne qui me plait, j'ai un peu de mal à rester calme. Le stress m'emporte assez rapidement, surtout dans ce genre de situation.

L'épisode de pétage de plomberie terminée, je file directement dans ma chambre pour aller me changer. On ne peut pas dire que je sois trop pudique. Je ne suis absolument pas du genre exhibitionniste non plus hein ! Il ne faut pas pousser à l'extrême. Mais disons que dans un moment comme ça, surtout en présence d'une femme, je ne vais pas instinctivement fermer la porte pour me changer. Mais je ne vais pas non plus me changer devant elle. Tout un concept ! Bref. Sans réfléchir, je retire mon t-shirt et file en sous vêtements devant mon armoire pour en choisir un autre, tout sec.

Je demande alors à Willow : «Tu veux quoi ? plutôt un t-shirt ou un pull ?» Elle se rapproche et en tournant la tête je la découvre à la porte de la chambre, me demandant de répéter : «Un t-shirt ou un pull ?» Je lui fais maintenant face, avec en haut juste mon soutien-gorge rouge. Elle me répond qu'elle préfère un pull et je lui attrape alors un pull gris à capuche que je lui envoie. Une fois fait, je me dirige vers mon lis, désormais dos à elle, et je retire mon sous-vêtement avant d'enfiler un long t-shirt de basket qui appartenait à mon meilleur ami, resté au Canada. Je retirais aussi mon pantalon qui en avait pris un sacré coup, et j'enfilais à la place un petit short qui me servait pour dormir la nuit. Venant du canada, je n'étais pas tellement frileuse. Au contraire, il faisait plutôt bon ici !

En sortant de la chambre, je trouvais Willow dos à moi en train de dégrafer son soutien-gorge avant d'enfiler le pull que je lui avais prêté. Je déglutissais et détournais le regard pour éviter de sentir une vague de chaleur m'envahir. C'était trop tard... Je repartais dans ma chambre chercher un plaid épais, et en revenant dans le salon, elle était déjà recroquevillée sur le canapé. Je venais la rejoindre et lui dis avec un petit sourire «T'as d'la chance, on se connaît que depuis ce soir et tu vois déjà mon pyjama !» je lâchais un petit rire avant de m'assoir à ses côtés sur le canapé, mes jambes pliées et mes pieds sous mes fesses. « Ton appartement est sympa mais ça manque d'une cheminée! ». Je lui offre un petit sourire et lui déplie l'épais plaid pour qu'elle puisse s'enrouler dedans. «Tiens. Ça va te réchauffer un peu !». Je la regarde s’emmitoufler dedans et je récupère Jules qui demande de nouveau à monter sur le canapé. Je remarque qu'il a déjà bien pris ses marches ce petit bout. Je reprends rapidement mes caresses sur le chiot et Willow brise le silence en me demandant « Dis... Si tu ne veux pas me répondre je comprendrais mais... Par rapport à ce que tu as dit tout à l'heure... Je me demandais...Comment tu gères le fait d'avoir "passé à autre chose" tout le jours? ».

Nous y voilà. Je savais bien que j'avais senti quelque chose en posant mon regard sur elle pour la première fois ! Je devinais assez rapidement ce qui se passait dans la tête de la jolie Willow. Je lui offrais un sourire qui se voulait rassurant. Évidemment que j'allais lui répondre !
«Ben en fait... j'me suis jamais vraiment posé la question. J'ai eu des petits amis, jusqu'à... 17-18 ans à peu près, et puis un jour j'ai rencontré une fille. J'ai su tout de suite que ce qui se passait entre nous c'était pas juste de l'amitié. Et ça s'est fait naturellement, je me suis laissée guider. J'peux pas dire que j'aime les femmes, ou que j'aime les hommes. Je marche au coup de coeur tu vois... quand je craque pour quelqu'un, c'est qu'il y a quelque chose en lui, ou en elle, de spécial, qui me plait. Que ce soit un mec ou une fille. Mais bon. Après elle, j'ai pas mal souffert, et puis il s'est passé quelque chose d'important dans ma vie qui fait que je n'ai pas trop eu de vraies relations longues et stables après elle. Et maintenant j'suis ici, et j'me pose toujours pas de questions. Je cherche pas, j'attends rien. J'me laisse porter. Mais bon... quand je disais que j'suis passée à autre chose, c'est parce qu'avec cette fille, j'ai vécu vraiment un truc fort, alors j'me dis que si je veux revivre un truc fort, ce serait sûrement avec une femme. Je sais pas...enfin bref ! Je sais pas si j'ai répondu à ta question. Je sais je parle un peu trop parfois... Je crois que c'est l'insomnie permanente qui fait ça. Ou l'alcool. Ou les deux...» Ou ta présence... Je lâchais un petit rire et soupirais un peu en faisant une grimace. «En tout cas ce qui est sûr, c'est qu'être avec une fille, c'est pas moins facile, mais au moins on vient toutes de venus, et on se comprend mieux qu'une fille peut comprendre un mec, ou vice versa.»

Je n'en ai peut-être pas beaucoup vu mais le peu que j'ai pu je peux affirmer que le corps d'Eileen est juste magnifique. Contrairement à moi qui ait des formes, ses hanches sont fines et son ventre plat. Sa peau semble lisse, dépourvue de défauts... Bref, elle est très attirante et je me sens presque mal dans mon propre corps face à elle. C'est pour ça que je me suis retournée pour retirer mon t-shirt ainsi que mon soutient gorge avant d'enfiler le pull qu'elle me prête si gentiment. Ma maman m'a toujours dis d'aimer mon corps et d'en prendre soin parce qu'on en avait qu'un seul et que c'était comme ça que Dieu voulait que son enfant soit. Ma maman était très religieuse, un peu trop même. Une des raisons pour laquelle je cache ma vraie sexualité. Je sais qu'elle n'est plus de ce monde, mais j'ai peur qu'elle soit quand même déçue. Je suis loin d'être parfaite, j'ai des hanches et je me suis un peu trop jeté sur le pot de glace au chocolat après la mort de maman. Sans parler que je ne suis pas spécialement grande ni élancée comme Eileen. Je me surprends à vouloir poser mes mains sur son corps et c'est à ce moment là que je décide de tourner le dos pour aller me mettre en boule sur le canapé.

A peine posée, Eileen arrive dans la pièce avec un plaid dans les bras. Elle est en mini shop et long t-shirt. Comment fait-elle pour ne pas avoir froid alors que moi en pantalon et en gros pull, je suis congelée. Je lui fais un sourire à sa remarque avant dire que son appartement a beau être sympa, ça manque d'une cheminée. C'est là qu'elle me propose le plaid que j'accepte avec plaisir. Je m'emmitoufle dedans en faisant attention à ce qu'aucune partie de mon corps ne soit pas couvert. Petit à petit mes grelotements cessent et je prends mon courage à deux mains pour poser une question à Eileen. C'est un peu gonflé mais en même temps, si elle ne me le dit pas, je ne dormirais pas cette nuit. Cette nuit? Que dis-je. Il est plus de trois heures du matin. La nuit est déjà bientôt finie mais c'est tellement agréable de passer du temps avec elle que je ferais bien nuit blanche pour en apprendre davantage sur la jeune femme... J'aimerais savoir comment elle fait chaque jour pour vivre avec son homosexualité. Je respecte ceux qui assument mais pour moi c'est tellement dur. Ma maman m'a tellement rabâché les oreilles avec ça et à quel point c'était mal que quand je me suis rendue compte que j'étais tout le contraire de ce qu'elle voulait, je me suis menti à moi même pour essayer de m'en sortir. C'est sans le dire que je lui demande des informations. Elle peut très bien se douter de quelque chose mais je ne l'ai pas dit clairement.

La jeune femme m'offrit un sourire rassurant et j'appuya ma joue contre le dossier de son canapé, me sentant presque comme chez moi. Ce qui est bon signe. Petit à petit, je me détends. Je n'ai pas avoir honte avec elle. Elle sait de quoi elle parle et ne me jugera sûrement pas. Mon frère est au courant pour ma sexualité. D'ailleurs, il refuse que Luke vienne à la maison parce qu'il a peur de mettre les pieds dans le plat. Il m'accepte comme je suis. Il est comme moi à penser que maman exagérait avec la religion mais jusqu'à ce soir, il était la seule personne à savoir. Je me rends compte que c'est plus facile d'en parler avec Eileen que je ne connais que depuis quelques heures, qu'avec des gens que je connais depuis des années. J'écoute attentivement le récit de la jeune femme. Je bois même ses paroles. Et ça me rassure. Avec ces quelques mots, je me sens moins "anormale" car dans le fond, il n'y a rien de pas normal à être homosexuelle mais on m'a tellement répété le contraire que je me sens sale et différentes depuis toutes ces années. Je souris en l'entendant dire qu'elle s'excuse de parler autant et j'ai envie de lui dire "continue j'adore quand tu parles" mais je me retiens. Pas besoin de passer pour une débile tout de suite. Quand elle met un point à son explication, je pousse un petit soupir, ne pouvant pas me détacher de son beau regard. Elle est mon modèle dès à présent. « Tu vois... Je me rends compte que je suis bien plus à l'aise avec toi sur ce canapé à parler de ça, que de parler d'avenir avec mon copain. » Je suis toujours tendue et susceptible quand on parle avec Luke. Je ne me sens jamais à place. Alors que là avec Eileen... J'ai l'impression qu'il y a une connexion, qu'elle me comprend vraiment. « Tu es ma nouvelle idole. J'aimerais assumer et être à l'aise comme toi. Parce que dans le fond, même si je ne le dis pas, je ne suis pas heureuse comme ça. »

Seulement quelques centimètres nous séparent et ça ne fait que quelques heures qu'on se connait, mais déjà j'ai envie d'aller me blottir dans ses bras pour chercher du réconfort, de l'affection. Je n'en manque pas. Luke me donne toute l'affection possible mais c'est pas cette affection que je cherche. « J'ai envie de savoir ce que ça fait... Je suis attirée par cet inconnu, ces sensations que je ne connais pas. » Pourquoi les mots sortent aussi facilement avec elle? Même à mon frère je ne l'ai jamais dis ça. Mes joues rougissent un peu et je baisse le regard sur le bout de plaid que je triture entre mes doigts.

Ouiiii bon ok parfois je parlais un peu trop, mais bon on ne peut pas me le reprocher si ? Visiblement ça n'avait pas l'air de déranger Willow qui ne me lâchait pas des yeux. D'ailleurs, elle avait le don de me perturber légèrement. Pas que légèrement en fait. C'était comme si son regard sur moi me faisait fondre. Pas fondre comme quand on trouve quelqu'un beau et qu'on dit "il me fait craquer, il me fait fondre", non, là c'était fondre un peu dans le sens chimique. Difficile à expliquer.

Bref, je terminais donc mon long monologue sur comment s'accepter quand on aime des gens du même sexe que soi, et Willow ne me lâchait toujours pas des yeux. Je changeais de position pour être vraiment face à elle, c'est à dire de profil par rapport à la position normale de quelqu'un assis sur un canapé. Mes jambes toujours recroquevillées sous mes fesses, et je posais mon bras sur le dossier, sur lequel je reposais ma tête. Elle avait elle aussi la tête posée sur le dossier du canapé. « Tu vois... Je me rends compte que je suis bien plus à l'aise avec toi sur ce canapé à parler de ça, que de parler d'avenir avec mon copain. » Je lâchais un petit rire amusé. Willow avait un petit côté femme enfant qui me plaisait beaucoup. On était assez différentes mais malgré tout je retrouvais quelque chose en elle que je sentais tout au fond de moi. Toujours autant inexplicable. Je lui répondais alors «Sans doute parce qu'avec ton copain tu n'es pas autant toi même que tu le voudrais...»

Je ne la lâchais pas non plus des yeux. Elle avait l'air un peu moins tendue qu'un peu plus tôt dans la soirée, comme si j'avais réussi à la calmer un peu avec mes mots. Sur les questions qu'elle se posait, sur ce qu'elle ressentait etc... « Tu es ma nouvelle idole. J'aimerais assumer et être à l'aise comme toi. Parce que dans le fond, même si je ne le dis pas, je ne suis pas heureuse comme ça. » Je grimaçais légèrement avant de lui répondre en la rassurant. «Tu sais, j'ai eu beaucoup de problèmes dans mon enfance, j'ai failli mourir plusieurs fois, après ça on relativise et on se dit que la vie est trop courte pour se faire des noeuds comme ça. Mais tout le monde n'est pas comme moi, et c'est normal d'avoir peur. C'est pas rien, surtout vu la société. On est mis dans des cases à la con, toi t'es homo, toi t'es hétéro.. c'est con ! J'ai toujours détesté ça. L'important c'est le coeur, ce qu'on ressent au plus profond de nous.. le reste on s'en fout. Et puis finalement, l'important c'est pas ce que les autres penses, c'est surtout notre bonheur. La recherche du bonheur c'est toute l'existence humaine. Alors si on bouscule pas un peu tout pour être nous même, on trouvera jamais le bonheur !». Merci pour cette intervention philosophique Eileen ! Avec elle, Willow va pouvoir s'endormir ! Mais même pas...

On était bizarrement assez proches toutes les deux, une proximité presque naturelle s'était installée. Sans le vouloir. Je pouvais presque sentir son souffle sur mon bras. Et, toujours le regard plongé dans le mien, elle m'avoue : « J'ai envie de savoir ce que ça fait... Je suis attirée par cet inconnu, ces sensations que je ne connais pas. ». Je plissais les yeux en la regardant, un petit sourire au bout des lèvres. «Jamais ? Jamais jamais ? T'as même jamais embrassé ta meilleure amie au primaire ou au collège ?» Je trouvais ça mignon, et à la fois assez triste. Si elle se sentait attirée par les femmes, comment pouvait elle être sûre que c'est ce qu'elle aimait, peut être une fois fait, elle se rendrait compte qu'elle n'aime pas ça ? «Ce serait pas très compliqué à savoir... !» Elle relevait les yeux sur moi, et avant même qu'elle n'ait eu le temps de se rendre compte de ce qui allait se passer, je m'avançais vers elle et déposais un tendre baiser sur ses lèvres. Je ne voulais pas la brusquer, ni la force à quoi que ce soit. Si je m'étais écouter, je crois que j'aurai fait plus que cela, mais ce simple baiser serait sûrement déjà assez pour elle, du moins, pour le début.

Je prenais un peu de distance, doucement, et réouvrais les yeux pour voir sa réaction. Elle avait gardé les yeux fermés. Je sentais mon coeur battre dans ma poitrine, je crois que j'avais un peu peur qu'elle s'en aille en courant. Et lorsqu'elle ouvrit les yeux, je lui demanda, tout bas «Ça va ?»

J'ai passé toute la soirée à penser qu'Eileen était cent pour cent hétérosexuelle, et ça même si elle a dansé avec une fille. Elle aurait très bien pu être sa meilleure amie ou j'en sais rien. Une preuve de plus que je suis une fille très naïve, parce qu'elle me fait sous-entendre qu'elle aime aussi les filles. Je vois ça comme un soulagement. Je me sens presque immédiatement à l'aise car je n'ai pas à avoir honte avec elle. Elle sait ce que je peux ressentir et je saute d'ailleurs sur l'occasion pour lui poser mes questions. Je ne connais personne dans mon entourage qui soit bisexuel ou homosexuel, et comme ce n'est pas forcément marqué sur le front des gens, je n'ai jamais pu en parler avec quelqu'un d'expérience. Plus Eileen parle, plus je me détends, comme s'il y avait une connexion, comme si on allait enfin répondre à mes questions. Je suis loin de m'assumer. Je fais même tout pour me cacher. J'ai un petit ami que je n'aime pas de cette manière, je ne fréquente aucune fille et à part pour aller travailler, je ne sors pas de chez moi. Mais je ne peux pas le nier plus longtemps, pas devant Eileen surtout qui semble être presque soulagée que j'aborde le sujet. Peut-être se doutait-elle de quelque chose depuis qu'on s'est retrouvées dans le couloir des toilettes et de la réserve. Je bois ses paroles, essayant de les assimiler et surtout d'apprendre. Moi aussi je veux m'assumer. J'aimerais en avoir rien à faire de la société et des religieux, j'aimerais pouvoir me dire que ma maman m'aurait aimé de la même manière juste parce que j'étais sa fille.

Eileen met le doigt sur le problème avec Luke. Je ne peux pas être moi même avec lui et c'est tout à fait ça. Je suis obligée de lui rendre ses baisers, d'aller au lit avec lui quand il me le demande, je suis obligée de lui faire croire que des fois c'est moi qui en ait envie parce que sinon il va se poser des questions... Je ne dirais pas que lorsqu'il me tient la main en public ça me répugne mais c'est bizarre. Je me vois mal tenir la main de mon frère par exemple, bien qu'on soit très proches.

Eileen plongea son regard dans le mien et j'ai l'impression que tout ce qu'il y a autour de nous n'existe plus. Plus de Jules qui mordille mon plaid, plus de voitures qui roulent derrière les fenêtres, plus de robinet qui fuit. Que nous deux sur ce canapé à parler sincèrement et entièrement. La jeune femme reprend la parole et essaie de me rassurer du mieux qu'elle peut. Je ravale difficilement ma salive en l'entendant dire qu'elle a failli mourir plusieurs fois mais vu qu'elle poursuit, j'en déduis qu'on en est pas encore aux révélations de ce genre... Ma nouvelle amie a raison sur toute la ligne à propos de la société. On est mis dans des cases et si on a "malheur" de ne pas être dans la bonne, on nous jette des pierres à la tête. C'est triste. C'est une des grandes raisons pour lesquelles je ne révèle pas ma sexualité. Je ne supporterais pas d'être pointé du doigt. Je n'ai pas assez de force caractériel pour assumer les regards des autres si je venais à tenir la main d'une femme dans les rues de Town Square. Je suis née ici. C'est une petite ville, les gens se connaissent tous, c'est un peu la campagne comparé à New York. Ici les homosexuels sont regardés différemment. A New York, avec mon métier j'ai passé un temps fou à parler avec des stylistes homosexuels et il y avait pas de lézard. Ici... C'est autre chose.

J'essaie de faire comprendre avec mes mots ce que je ressens à Eileen. Vous savez ce qu'on dit; l'interdit nous attire et c'est exactement ce qu'il se passe pour moi. Je suis attirée par ce que je n'ai jamais pu toucher, embrasser, tester. J'ai envie de savoir ce que ça fait et si je ressentirais davantage qu'avec un homme. Eileen semble amusée de comprendre que je n'ai jamais embrassé une femme, même pas une copine à l'école. Je baisse la tête un peu honteuse mais je n'ai pas le temps de comprendre quoi que ce soit que la jeune femme vient comme violer mes lèvres. Sans que je ne lui ai donné la permission.

Un tas de choses se passent dans ma tête. Tout d'abord, je me rends compte que même si ce n'est qu'un baiser "test" je trahi Luke en quelque sorte. Bien que ça fait quatre ans que je le trahis... Mais d'un autre sens, une vague d'émotions m'envahissent. J'en restais un peu choqué sur le coup, je ne remarqua même pas qu'Eileen s'était écartée de moi. Je me rends aussi compte que j'ai arrêté de respirer ces dix dernières secondes. Je finis par reprendre ma respiration et ouvre les yeux pour regarder la jeune femme. Wow. Je n'ai jamais ressenti ça avec Luke. En temps normal ce ne sont que nos deux lèvres qui se touchent mais là c'était tellement plus. C'était peut-être pas un baiser très recherché mais je l'ai trouvé sensuel et j'ai l'impression qu'une nouvelle connexion s'est faite avec Eileen. Je déglutis et baisser un peu la tête. J'ai envie de recommencer, j'en suis sûre mais je ne sais pas si j'ose. Et si Eileen m'a embrassée juste pour que je teste mais qu'il n'y en aura pas d'autres? Elle me regarde toujours avec ses magnifique yeux foncés et j'ai l'impression de me noyer dedans. On est tellement proches que son parfum vient me chatouiller les narines comme tout à l'heure au bar quand on était obligées de se parler tout près. Je baisse les yeux sur ma main, main que j'avance petit à petit vers la le genoux d'Eileen. Sa peau est douce... Je crois que pour une fois, je n'ai pas envie de me mettre des barrières. Je suis chez Eileen, on est que les deux, personnes ne peut nous voir, je n'ai donc pas besoin de me retenir surtout que ce qu'elle vient de faire me fait réaliser que j'en veux plus, que je veux rattraper le temps perdu. J'approche à nouveau mon visage du sien, frôlant son nez avec le mien. C'est une manière de lui demander la permission. Je ne vais pas contre ses lèvres immédiatement, je tâte le terrain, j'attends de voir si elle se recule ou pas et comme elle ne le fait pas, je finis par reposer mes lèvres sur les siennes. Leur goût, leur texture, leur douceur... Je me prends une baffe après l'autre mais des bonnes baffes. Des baffes positives. Je suis uniquement mon instinct en ce moment même. Nos bouches restent accrochées ensembles, comme si elles avaient été faites pour se mouler parfaitement entre elles.

L’atmosphère avait légèrement changé d’ambiance, et des teintes plus sensuelles avaient pris possession de l’air. J’avais pris mon courage à deux mains en embrassant pour la première fois Willow. Pas que je n’en avais pas envie bien au contraire, seulement la peur qu’elle me rejette me rongeait légèrement. En me séparant d’elle, je guettais la moindre réaction de sa part, en espérant qu’elle ne soit pas mauvaise. Elle réouvrait les yeux et je compris directement que ça n’avait pas l’air d’aller mal, mis à part peut être la montée d’adrénaline d’un coup.

Quand j’avais rencontré Sara la première fois, je m’étais sentie un peu comme Willow, perdu, et j’avais besoin qu’on me montre un peu ce que je devais faire. Elle avait été là pour me rassurer, et je me rendais compte que j’étais en train de prendre le même chemin avec Willow. Mais une petite voix au fond de moi me disait ‘’attention, elle est en couple, elle ne sait pas où elle en est, ne t’attache pas ! ‘’. Oui ben… c’était facile à dire ! Elle me plaisait beaucoup, et malgré l’étrangeté de notre premier baiser, j’avais senti les fameux papillons dans mon ventre. J’essayais pourtant de ne pas trop y faire attention, je sortais d’une situation personnelle difficile (bien que ça ne concernait pas l’amour), je ne voulais pas non plus retomber dans quelque chose qui allait me rendre malheureuse. Mais malgré ça, je me sentais attirée par la jeune femme, c’était bien plus fort que moi.

En sentant sa main se poser timidement sur mon genou, j’esquissais un sourire, c’était un peu comme me rendre compte que je ne l’avais pas bloquée avec mon baiser d’il y a quelques secondes. Le fait qu’elle revienne d’elle-même me fit plaisir, et je m’avançais alors un peu plus vers elle. Mes jambes glissaient sous sa main qui elle ne bougeait pas, et elle se retrouva donc plus au niveau de ma cuisse que de mon genou. Elle avançait son visage vers moi et je fermais immédiatement les yeux. J’adorais cette sensation, quand on ‘oubli’ un sens, que les autres se décuplent. Je pouvais sentir son parfum, son souffle se poser sur moi, j’entendais sa respiration légèrement plus rapide, plus présente.

Je sentis alors son nez frôler le mien, ce qui créa immédiatement un petit sourire au bord de mes lèvres, comme un acquiescement, elle pouvait faire de moi ce qu’elle voulait. Ses lèvres se posèrent alors sur les miennes. Cela me rassurait que ce baiser vienne d’elle, je n’aurai pas voulu la presser, la brusquer, et mine de rien, la laisser faire était aussi une chose très importante. Nos lèvres de nouveau scellées, je venais poser ma main sur sa joue et la laissais glisser dans son cou, sa nuque. Quant à sa main, je sa sentais se rafermir un peu sur ma cuisse, ce qui me procura un espèce de long frisson le long de mon dos. La lenteur et la tendresse de notre baiser, aussi basic soit il, avait tendance à me rendre folle. Je sentais mon cœur s’emballer et je me laissais aller à lui offrir un baiser légèrement plus osé que le précédent. Je ne tentais pas encore à caresser sa langue avec la mienne, mais j’optais plutôt pour le baiser de cinéma.

Au bout de quelques longues secondes, je séparais mes lèvres des siennes, le souffle court. Je gardais mon front posé sur le sien, ma main toujours dans sa nuque. Il fallait que je reste concentrée. Mes sens étaient en émoi et je me devais de rester calme, douce et tendre avec elle. Ce baiser m’avait pourtant donné envie d’être plus sauvage, plus féline comme je l’étais quand je sentais les papillons chatouiller mon bas ventre. Je rouvrais les yeux pour plonger mon regard dans le sien, elle n’avait pas bougé d’un millimètre. Je me pinçais alors la lèvre en souriant, elle commençait à me rendre folle, je n’étais pas sûre que ce soit une très bonne chose, mais à ce moment précis je préférais ne pas y penser. Je lui dis alors tout bas « Je sais pas c’qui s’passe mais y’a un truc chez toi qui me rend carrément dingue !! ». Je lâchais un petit rire et louchais légèrement sur sa bouche avant de replonger dans ses magnifiques yeux noirs.

Je venais de vivre mon premier baiser avec une femme. Ce n'était pas du tout prémédité, je ne m'y attendais vraiment pas et pourtant, ça avait été presque magique. Eileen avait été spontanée mais je n'allais en tout cas pas lui en vouloir car même si on ne se connait que depuis quelques heures, je lui faisais déjà assez confiance pour partager ça avec elle. Ce baiser était un peu timide, presque chaste étant donné que c'était mon premier et qu'Eileen ne voulait peut-être pas me brusquer. Elle a été douce et très tendre. Les sensations qui m'ont traversées à ce moment là sont indescriptibles. Je me rends compte que jamais je n'ai ressenti ça avec un homme et que je loupe quelque chose depuis toutes ces années où je me cache derrière l'étiquette de la fille en couple.

Maintenant j'y ai goûté. Je sais enfin ce que ça fait et je n'ai qu'une envie; que ça continue. Ca peut paraître un peu présomptueux de ma part, mais j'ai tellement apprécié cet échange que je m'arme de courage en m'approchant à nouveau vers elle. Pourquoi c'est simple avec elle? Pourquoi - bien que j'ai peur de mal faire - je suis moins timide avec elle? Pourquoi j'ose recommencer l'expérience alors qu'en temps normal je me serais sûrement enfuie? Qu'est-ce qu'il se passe avec Eileen?

Alors que mes doigts glissent sur le genou nu de la jeune femme, je sens mon coeur tambouriner dans ma poitrine. J'ai l'impression de toujours avoir le goût de ses lèvres sur les miennes... Nos visages déjà bien proches, se rapprochent de quelques centimètres et Eileen tend les jambes sous ma main. Sa peau est douce et sensuelle. J'ai peur de trembler. Elle le sentirait immédiatement et je serais vraiment honteuse. Ma main glisse encore jusqu'à sa cuisse. Puis nos lèvres se retrouvent presque naturellement. Comme si c'était là qu'elles devaient être. Je suis moi même étonné de la normalité de la situation alors que je suis clairement en train d'embrasser quelqu'un du même sexe que moi. Je n'ai pas envie que ça s'arrête. Nos bouches viennent de se retrouver et j'ai déjà peur qu'elle y mette fin. Mais au contraire, ce baiser devient plus profond, plus sensuel. Tous mes sens étaient en éveil, ce qui ne m'étais jamais arrivé avant. Sa main se pose sur ma joue et je me retrouve surprise. La surface de ma peau se retrouve comme électrisée alors qu'elle descend ses doigts sur ma nuque. Mes doutes me reviennent presque en pleine figure. Je n'ai jamais embrassé une femme avant, suis-je à la hauteur? Je ne sais pas si je dois m'y prendre de la même manière qu'avec un homme. Mes doigts se crispèrent sur la cuisse d'Eileen. Ca devenait intense et malgré mes doutes, pour rien au monde j'aurais voulu que ça s'arrête.

Au bout de plusieurs minutes, la jeune femme s'écarte très lentement et délicatement de moi. Comme si elle avait peur de me brusquer. J'apprécie sa gentillesse, le fait qu'elle ne me stresse pas et qu'elle ne me saute pas dessus. Elle me laisse aller à mon rythme et c'est une preuve de plus que c'est une personne en or. Je reprends mon souffle du mieux que je peux, ayant arrêté de respirer presque durant toute la durée du baiser. Je ferme un peu les yeux, front contre front. C'est presque... romantique. Je suis gentiment en train de me rendre compte de ce qu'il vient de se passer et de ce qui évolue en moi à l'égard d'Eileen. J'ouvris les yeux en l'entendant respirer comme si elle allait parler. Et il ne faut que quelques secondes pour qu'elle dise tout haut, ce que je pensais tout bas. La sincérité de son regard me fait perdre pied. Jamais en me levant ce matin, j'aurais cru que j'allais me retrouver dans l'appartement d'une cliente à avoir mon premier baiser avec une femme. Et le pire - ou le meilleur - dans tout ça c'est que je ne regrette pas une seule seconde ce qu'il vient de se passer. Au contraire, c'est presque une révélation pour moi. Je souris suite à sa remarque mais mon regard s'assombri légèrement. « Excuse ma maladresse... Je n'ai jamais... Je veux dire... » Je pousse un soupir. J'ai l'impression d'être vierge. D'être une adolescente pure et chaste. Ma main est toujours posée sur sa cuisse et de mon pouce, je lui caresse doucement sa peau douce. « C'était... incroyable. Je ne peux être que sûre de ce que je suis et de ce que je ressens surtout. » Je la regarde timidement, m'emballant certainement mais je m'en fiche. Je lâche un petit rire nerveux. « C'est normal que j'en veuille encore? »

Spoiler:

Il fallait que je me contrôle. Ce n'était forcément évident pour quoi qui était sûre de ce que je ressentais, de ce que je faisais. Ce n'était pas comme si c'était la première fois, comme ça l'était pour elle. Je sentais son pouce se balader doucement sur ma cuisse et faisais de même avec le mien sur sa joue.
Je n'aurai jamais pensé être arrivée hier et être déjà en train d'embrasser une femme dans mon appartement. Mais la situation était telle que je n'y pensais pas vraiment, j'étais juste bien, j'espérais seulement ne pas la brusquer, je ne voulais pas lui donner une mauvaise image des homo, et je ne voulais pas non plus qu'elle ait peur de moi.

Après lui avoir avoué qu'elle me rendait légèrement dingue, je sentais dans son regard que quelque chose n'allait pas vraiment. Je sentis mon coeur battre un peu plus fort, j'avais un peu peur de ce qu'elle allait me dire. Je ne voulais pas qu'elle parte. Je me sentais bien là avec elle. « Excuse ma maladresse... Je n'ai jamais... Je veux dire... » . Je lui offrais un tendre sourire et caressais tendrement sa joue de mes doigts fins. Elle m'avait déjà dit qu'elle n'avait jamais embrassé une femme et elle s'en sortait plus que très bien. En même temps, un baiser reste un baiser, avec un homme ou avec une femme, la seule différence est ce que l'on ressent à l'intérieur de nous. « C'était... incroyable. Je ne peux être que sûre de ce que je suis et de ce que je ressens surtout. » Je souriais une nouvelle fois. J'étais d'un coup rassurée, et ça se ressentait même physiquement sur mon corps. Je relâchais mes épaules auparavant légèrement tendues, et je lâchais un petit soupire. «Ouf ! J'ai eu peur que tu partes en courant !». Je luis souriais une nouvelle fois avant qu'elle ne m'avoue « C'est normal que j'en veuille encore? ». Je lâchais un petit rire amusé et me pinçais la lèvre avec envie tout en ne lâchant pas ses yeux. Je lui murmurais alors «Je crois que maintenant que tu y as goûté tu risques d'avoir du mal à t'en passer !». Je lâchais à mon tour un petit rire. Cette phrase ne parlait absolument pas de moi, mais plutôt de ses sentiments. Je n'étais pas mégalo et pas du genre à lui dire qu'elle ne pourrait pas se passer de mes baisers. Mais ce qui était sûr c'est qu'elle allait avoir du mal à se passer de tout ce qu'elle était en train de ressentir. C'était sa vraie personnalité qui faisait surface.

Après sa phrase, il ne me fallut pas longtemps avant de l'embrasser une nouvelle fois. Je prenais un peu moins de précautions qu'un peu plus tôt, même si je restais douce et attentionnée envers elle, attentive au moindre de ses mouvements, ressentis. Peu à peu je me rapprochais un peu plus d'elle, la faisant se pencher légèrement en arrière. De ma main libre je dégageais le plaid qu'elle avait sur les genoux. Et tout en l'embrassant toujours, je me penchais encore plus sur elle, me retrouvant pratiquement allongée sur elle. Ma main libre glissait sur sa hanche puis dans son dos, pour l'instant sur son t-shirt, je ne voulais pas trop brusquer les choses. J'arrêtais une seconde de l'embrassais et la laissais reprendre son souffle. Je souriais amusée et la taquinais gentiment, avec bienveillance «T'as le droit de respirer tu sais... !». Le sourire qu'elle m'adressait me rassurait doucement, alors que je sentais sa main hésitante se placer dans mon dos, ce qui me ramena un peu plus vers elle.

Je sentais tous mes sens s'émoustiller depuis quelques minutes. C'était assez étrange ce que la douceur et la tendresse pouvait éveiller chez moi. Et le fait de prendre notre temps agissait sur moi comme quelque chose de très excitant. Lorsqu'elle reposa ses lèvres sur les miennes, je souriais intérieurement de voir qu'elle prenait doucement de l'assurance, et surtout qu'elle en avait envie, et ça c'était déjà une victoire. Je passais alors délicatement ma main sous son t-shirt, au niveau de sa taille et dans le bas de son dos. Je sentais rapidement des frissons sur sa peau et elle se cambra légèrement, ce qui me rendit carrément folle.

Mais tout ça aurait été bien trop facile. A cet instant mon téléphone se mit à sonner sur la table basse. J'avais du mal à quitter les lèvres de Willow mais pourtant je devais faire quelque chose ou j'allais envoyer mon téléphone contre le mur. Je me séparais donc de ses lèvres et lui dis tout bas «Je vais l'éteindre c'est mieux ! ». Je me redressais et me penchais vers la table basse pour attraper ledit téléphone. Mais en voyant l'appelant, je soupirais. C'était ma mère. Avec le décalage horaire, il devait faire jour chez eux. Je tournais les yeux vers Willow et m'excusais. «Je suis désolée je dois répondre, c'est ma mère, on sait jamais...». Et je portais le téléphone à mon oreille en décrochant. «Maman tu sais qu'il est 4h du mat' ici ? Oui. Oui je suis toujours insomniaque. Oui. Pourquoi tu m'appelles ça va pas ? Ah. Non non tout va bien ici. Non j'étais en train de... » je tournais la tête vers Willow avec un micro sourire aux bord des lèvres et finissais par répondre à ma mère. «je bosse. Oui sur mon roman. Oui ça avance. Maman tu m'appellais pour vérifier si je bosse bien ? C'est une blague ? Ok. Oui. Non mais je vais te laisser. Je te rappelerai demain. Ok. Moi aussi. Bisous.» Je raccrochais enfin le téléphone et le mettais en silencieux.

Je me retournais vers Willow, toujours assise sur le canapé, j'espérais qu'elle n'ait pas eu le temps de réfléchir et d'avoir de mauvaises pensées entre temps. «Je suis désolée. Ma mère est... un peu... collante...» Je grimaçais légèrement et je sentais que quelque chose n'allait pas à ce moment précis. Willow ne m'avait pas dit que sa mère était décédée. «Ça va pas ?»

La tendresse et la douceur d'Eileen me choqua. Après tout, elle aurait très bien en avoir rien à faire que ça soit mon premier baiser avec une femme - même si dans le fond ça ne change pas grand chose avec un homme mais vous comprenez le principe - et pourtant, elle ne m'avait pas brusqué et la manière avec laquelle elle me caressait la joue me donnait envie de m'assoupir contre elle. Comment est-ce possible de ressentir une telle attirance pour une personne qu'on a rencontré il y a à peine quelques heures? Je n'ai jamais cru au coup de foudre mais je vais peut-être revoir mon jugement...

Je fis part de mes impressions à la jeune femme, la rassurant sur le fait que j'avais aimé et que je ne comptais pas partir en courant. Bien au contraire, je ne voulais plus décoller d'ici. J'étais bien près d'elle, ma main sur sa cuisse et la sienne sur mon visage. Elle me rassura à son tour quant à mon envie de recommencer. Elle a sûrement raison. Maintenant que je sais vraiment ce que ça fait, je vais avoir de la peine à ne pas en demander tout le temps. Les lèvres d'une femme sont tellement plus douces et sensuelles que celles d'un homme... Et puis Eileen me vendait juste du rêve. La jeune femme reprit possession de mes lèvres, pour mon plus grand soulagement. C'est comme si j'étais déjà en manque d'oxygène ou je n'en sais rien. Elle retira délicatement le plaid qu'elle m'avait offert il y a quelques minutes et je sentis ses doigts se glisser sous mon pull. J'eu un petit mouvement de recul mais plus par surprise qu'autre chose. Je ne m'y attendais pas et je ne suis pas habituée à être tactile avec quelqu'un d'autre. Elle me laissa reprendre mon souffle. Oui, j'avais à nouveau coupé ma respiration et j'allais pas tarder à tomber dans les pommes si je ne reprenais pas un peu d'air. Je souris avec elle, ma poitrine se soulevant rapidement pour pouvoir reprendre mon souffle. Elle me ramena contre elle. J'en profita pour passer mes jambes de chaque côté de ses hanches et ma main caressa sa cuisse puis descendit sur son mollet. Comment est-ce humain d'avoir une peau aussi douce qu'on a envie d'embrasser chaque parcelle?

Toujours envieuse, je repose mes lèvres sur les siennes. Y avait tellement de choses que j'avais envie de faire mais que je n'osais pas. J'avais envie d'aller chercher sa langue mais je me retiens. Je ne compris pas tout de suite ce qu'il se passait mais tout d'un coup, Eileen s'écarta de moi et plongea sur la table du salon pour attraper son téléphone portable. J'avais oublié qu'il y avait un monde extérieur, une terre qui tournait pendant que nous nous embrassions. Je compris très rapidement que la personne de l'autre côté du combiné était la mère d'Eileen. Je baissa quelque peu les yeux, ma gorge se serrant. Quand elle raccrocha, je m'écarta et un peu d'elle et me remit en position assise dans le canapé. C'était sûrement un peu brusque mais la voir parler avec sa mère c'était... enfin je ne sais pas comment l'expliquer mais mon coeur se serrait presqu'autant que ma gorge. J'eu l'impression d'avoir une boule tout d'un coup, une boule que je n'arrivais pas à avaler malgré tous mes efforts. Eileen fit remarquer que sa mère était un peu collante. J'étouffa un sanglot, essayant de me reprendre rapidement. Inquiète, la jeune femme me demanda ce qui n'allait pas. Quel contraste entre le moment sensuel qu'on partageait il y a deux minutes et mon envie de partir d'ici. Je me redressa dans le canapé, coupant tout contact physique avec Eileen. Je m'en veux beaucoup mais c'est plus fort que moi. « Disons que pendant que toi tu dis que ta maman est collante, moi j'aimerais que la mienne soit encore de ce monde. » dis-je d'une voix un peu tremblante. Je me passe nerveusement une main dans les cheveux, retenant toujours tant bien que mal mes larmes. « C'est ridicule. Désolée. Tu n'y es pour rien. C'est juste que c'est pas toujours facile. » Maman est morte il y a six mois et c'est toujours assez dur à vivre. Même avec mon frère.

Après avoir raccroché avec ma mère, je m'étais tournée vers Willow, et j'avais compris que quelque chose n'allait pas. En même temps, il ne fallait pas être devin pour le voir. Sa position dans le canapé, ses mains tremblantes dans ses cheveux, sa voix étouffée par sa gorge serrée... Je serrais les dents, j'avais peur d'avoir fait quelque chose de mal. « Disons que pendant que toi tu dis que ta maman est collante, moi j'aimerais que la mienne soit encore de ce monde. ». Je ravalais ma salive avec peine, en me prenant cette claque en pleine figure. Si j'avais su... A cet instant je me repassais le fil de notre soirée et je comprenais beaucoup de choses. J'essayais de respirer calmement même si je sentais une vague d'émotion me traverser, en la voyant dans cet état. «Je...» J'étais désolée, mais je ne savais pas trop quoi dire. Je me doutais bien que dans un moment pareil, aucun mot n'est aussi réconfortant qu'une présence. « C'est ridicule. Désolée. Tu n'y es pour rien. C'est juste que c'est pas toujours facile. » «Non je... excuse moi je savais que j'aurai pas dû répondre. C'est normal. Pardon...»

Légèrement hésitante, je m'approchais d'elle et la prenais dans mes bras délicatement, ma main dans ses cheveux, je posais sa tête contre moi. Je voulais simplement qu'elle sache que j'étais là. Au départ hésitant elle aussi, elle finit par se laisser aller. Je pouvais sentir son coeur battre fort, et je sentais surtout qu'elle retenait ses sanglots. Je passais ma main doucement le long de son dos pour essayer de la réconforter. «Pleurs si tu en as besoin... ça fait du bien...». Je sentis alors ses bras m'entourer comme une enfant, et elle finit par pleurer dans mes bras. J'avais une boule dans la gorge, je ne savais pas trop quoi faire de plus, sans doute cela suffisait-il, sans doute pas. Je posais ma main dans ses cheveux et la câlinais doucement, sans autre pensée que de la soutenir dans cette difficile épreuve. «T'inquiètes pas ça va aller... et puis t'es pas toute seule, il y a ton frère...!».

Elle reprit de nouveau un peu de distance pour sécher ses larmes et je me levais pour aller lui chercher une boîte de kleenex et un verre d'eau, que je lui apportais rapidement. Jules faisait une brève réapparition, demandant de monter sur le canapé. Je l'attrapais et le tendais à bout de bras près de Willow «Tiens regarde, y'a quelqu'un qui veut te faire un bisou pour que tu sois plus triste !» Je la voyais esquisser un sourire et ça me rassurait. Je posais alors Jules sur le canapé, entre nous deux, et je ne décollais pas mes yeux de Willow, qui elle avait le regard dans le vague. «Tu... tu veux rentrer chez toi ? J'peux t'appeler un taxi si tu veux... mais tu peux rester aussi. On pourrait... regarder un film, je sais pas...» J'étais en train de raconter n'importe quoi, je ne savais pas trop quoi faire à ce moment précis. «Je sais pas si c'est une bonne idée que tu rentres toute seule en fait... surtout qu'il n'y a personne chez toi... tu peux dormir ici si tu veux.. je dormirai sur le canapé ! Enfin... j'te laisse mon lit quoi...» C'était de pire en pire. Ok. Eileen ta gueule. «Dis moi c'qui te ferait plaisir...». Elle me faisait de la peine, j'avais l'impression de pouvoir ressentir sa tristesse et le vide que sa mère avait créé en elle. J'espérais seulement ne pas être trop lourde avec mes propositions, même si elles se voulaient gentilles et attentionnées.