And if you're ever feeling lonely just look at the moon, someone, somewhere, is looking right at it too.

Je vérifie une dernière fois que mon panier d'achat contient tout ce dont j'ai besoin pour passer la soirée avec mon petit frère. J'ai eu une soirée réservée pour Ezechiel, maintenant il est temps d'en faire de même avec Jordàn. Nous sommes une famille, ils sont plus importants que tout le reste et ces derniers temps, je me suis trop laissée absorber par mes deux jobs et mes histoires de coeur. Il est temps que je me rachète et surtout que je parle très franchement avec le benjamin de la famille. Je ne suis pas dupe, je sais qu'il nous cache quelque chose et j'ai une petite idée de quoi. J'en ai longuement parlé avec mon colocataire; Gillian. Il a essayé de tourner autour de pot mais pour lui, c'est indéniable; Jordàn nous cache une éventuelle attirance pour les hommes. Je ne me sens pas vexée qu'il ne nous ait pas parlé de ça mais je crois que dans toute la famille, je suis la mieux placée pour pouvoir parler librement de ça. Lorsque j'ai compris que j'aimais les femmes, je l'ai un peu caché au départ, mes parents n'ont pas tout de suite été au courant mais je n'ai pas mis long à en parler à Ezechiel car Jordàn était un peu petit pour comprendre. Mais dès qu'il m'a vue rentrer à la maison avec une fille, je lui ai dit et il a compris. J'aimerais qu'il en fasse de même si notre radar à Gillian et moi aurait raison. Et comme je peux savoir à quel point ce n'est pas facile de parler de sa sexualité - surtout avec un membre de notre famille - je décide de mettre les petits plats dans les grands et de passer par l'estomac de mon petit frère. Je suis une fine cuisinière et je sais qu'il a toujours raffolé de mes plats végétariens et BIO. C'est pour cette raison que je fais une dernière fois le tour de la boutique naturelle où je travaille pour être sûre que j'ai tout ce qu'il faut pour faire mes lasagnes aux légumes. Je paie mon panier juste avant la fermeture et une fois que tous mes articles sont emballés dans mon sac en toile, je compte la caisse et ferme la boutique. Quand c'est l'heure, c'est l'heure. J'attrape mon trench et mon sac de sport et accroche mon sac de courses à mon épaule avant de filer dans la rue pour chercher ma voiture électrique. Direction; maison.

Je commence par ranger toutes mes courses et à mettre mes affaires de yoga dans la machine à laver, puis je vais directement sous la douche. J'ai dit à Jordàn de venir pour vingt heures, il faut donc que je me dépêche un peu. Lorsque je sors de la douche enroulée dans une serviette, je croise mon colocataire, Gillian, qui semble rentrer épuisé de sa journée. Il se cache les yeux en me voyant vêtue seulement de ma serviette en éponge. « Putain Sasha, tu pourrais penser à mes yeux! » Je le frappe gentiment avec le coussin du canapé avant de rigoler et de le laisser filer dans sa chambre. « Si jamais, y a Jordàn qui vient passer la soirée là alors si tu pouvais éviter de sortir pendant sa présence ça serait cool. J'ai prévu d'avoir LA conversation avec lui. » Si Gillian pouvait déserter l'appartement ça serait carrément mieux surtout. « Ouais ouais! Allez va t'habiller, j'ai pas envie de faire des cauchemars. » Il ferme sa porte et je lève les yeux au ciel avant d'aller dans ma propre chambre pour enfiler un combishort à fleurs. Je laisse mes cheveux sécher à l'air libre puis je me mets enfin aux fourneaux. En une heure, mon plat de lasagne végétariennes est au four. Je sors deux verres et une bouteille de vin français très sucré. Je suis en train de poser les assiettes sur la table quand on toque enfin à la porte. Toute contente de voir mon petit frère, je vais lui ouvrir et le prends tout de suite dans mon bras quand je le vois. Les moments en famille sont trop rares... « Entre mon chaton. » Je lui souris avant de refermer la porte derrière lui. « Comment tu vas? Tu m'as manqué tu sais... »

J'ai passé la journée à essayer de réparer mon télescope mais je crois que la lentille est morte et je suis vraiment en colère parce que tout ça, c'est la faute du chien de la voisine. Il est mignon ce chien, c'est pas le problème, mais est-ce qu'elle est obligé de l'amener quand elle vient prendre un café avec maman ? La réponse est non. Mais elle le fait quand même. Et est-ce qu'elle pourrait surveiller son chien ? Évidemment que la réponse est oui mais qu'elle ne le fait pas. Alors il était là, en train de dormir sur le canapé alors que maman ne supporte pas ça et d'un coup, il a vu le chat d'un autre voisin passer dans le jardin et là, c'était fini. Il a couru comme un dingue droit dans le jardin par la porte fenêtre et il a tout renversé sur son passage. Mon télescope avec. J'avais bien entendu un vacarme de dingue alors je me suis mis en haut des escaliers pour demander à ma mère si tout allait bien et elle m'a assuré que oui. Mais dans la demi-heure qui suivait, après le départ de notre cher voisine, elle est montée la mine déconfite et elle m'a dit que mon télescope était tombé. Et depuis.. j'essaie de le réparer mais y a rien à faire, j'ai pas ce qu'il faut et le démonter entièrement ne m'a mené à rien du tout. Et puis maman est arrivée dans le salon avec sa voix toute fluette pour me demander si j'avais annulé avec Sasha et je me suis rappelé que je devais manger chez ma grande sœur. « Fait chier ! » J'ai tout balancé avant de me lever et d'aller enfiler mes chaussures. « Jordi mon cœur... C'est rien, on ira racheter ce qu'il faut... » J'ai soupiré. « Je sais maman, je sais. » Mais n'empêche que ça me contrarie vachement et que je vais arriver chez Sasha la tête en vrac. Enfin.

Je suis parti rapidement pour ne pas risquer d'être en retard mais je me suis quand même arrêté chez un fleuriste pour lui choisir un joli bouquet puis j'ai filé chez elle. Je suis toujours content d'aller chez ma sœur parce que si chez ma mère, on mange bien, chez ma sœur, on mange encore mieux. Et puis j'adore la voir, parce qu'elle est toujours de bonne humeur et qu'on se sent bien à côté d'elle. Et puis y Gillian. Parfois. Mais je ne vais pas en parler.

Alors je sonne, ma sœur ouvre la porte et quand elle ouvre ses bras, je me blottis contre elle et la serre fort parce qu'en fait, j'ai vraiment besoin d'un câlin. Je suis contrarié pour de vrai et ça me fait un bien fou. J'accepte de la lâcher au bout de quelques secondes et j'affiche un petit sourire. « Je vais bien et toi ? » Je rentre et laisse mes chaussures dans l'entrée, un peu par habitude.

And if you're ever feeling lonely just look at the moon, someone, somewhere, is looking right at it too.

Quand il s’agit de mes frères, je mets toujours les petits plats dans les grands. Ils sont ma famille et étant donné que je suis la seule fille, je me suis toujours sentie en sécurité avec eux, même si Jordàn est plus jeune que moi. J’ai toujours été comme une princesse lorsque nous vivions tous sous le même toit et à aucun moment je me suis sentie à part de cette famille. Dès le début, on m’a intégré comme on a intégéré le benjamin à sa naissance. Pour tout le monde, je suis une Fields et peu importe si mon carnet de famille précise que j’ai été adoptée. En grandissant, on s’est un peu tous séparés, trouvant notre propre voie et faisant des choix différents mais dès que je peux voir mes frères, je suis la plus heureuse. J’ai tendance a trop faire passer ma carrière avant mais la famille c’est clairement ce qui vient tout de suite après. C’est pour ça que comme les moments avec mes frères sont rares, lorsque j’en ai l’occasion, je fais en sortie de les gâter comme il se doit et de profiter un maximum de leur présence.

Ces derniers temps, Jordàn a un peu plus passé de temps ici que chez Ezechiel et même si je sais très bien pourquoi, j’en reste très ravie. Je précise juste à mon cher colocataire qu’il serait mieux qu’il reste silencieusement dans sa chambre ou qu’il en sorte pour être sûre de ne pas perturber mon petit frère lorsque j’aurai une grande conversation avec lui. Je ne suis pas duppe, je sais ce que Gillian lui fait comme effet. Il a la même tête que moi lorsque je regarde Anna. Enfin… Lorsque je la regardais. Mais bref. Tout est fin prêt pour que mon petit frère mange bien et profite de sa soirée. J’ai préparé un bon repas et maintenant qu’il a la makorité, je nous ai prévu une bonne bouteille de vin blanc. Heureusement, il ne tarde pas à arriver. Comme à chaque fois que je vois mon chaton, je lui saute dans les bras et l’embrasse sur la joue pour le saluer. Heureusement, il n’est plus en pleine crise d’adolescence parce qu’un temps, il m’engueulait quand je faisais ça en allant le chercher au lycée. Il me rend mon entreinte et ça fait vraiment un bien fou. Je n’ai peut-être pas de lien de sang avec lui mais d’âme oui. Je le laisse entrer dans l’appartement et souri bêtement en le voyant retirer ses chaussures. Il a tellement l’habitude de venir ici depuis quelques temps qu’il a déjà ses petites habitudes. Malgré le fait qu’il me dise qu’il va bien, je devine que quelque chose cloche. « Ca va aussi. » Décidemment, on est de bons menteurs chez les Fields. Je lui souri et l’invite à s’asseoir à table. « Tu as l’air contrarié, qu’est-ce qu’il se passe ? » Au même moment où je lui demande ça, de la musique se fait entendre de la chambre de Gillian. Je grimace, me retenant d’empoigner un couteau pour aller massacrer mon colocataire qui était sensé passer inaperçu ce soir. Je décide de l’ignorer, posant le plant bouillant de lasagnes végétariennes au centre de la table. Je regarde mon petit frère, légèrement inquiète de savoir ce qui peut le tracasser comme ça.