La journée avait tout bonnement commencé. J’étais parti tôt pour entreprendre mon travail de chanteur de rue au milieu de Town Square. Le soleil s’éclatait sur mes cheveux topaze et me donnait le sourire aux lèvres. La chaleur qui dégageait de l’astre ne pouvait faire autrement que de me raviver. Mes doigts grattaient les cordes douces de ma guitare tandis que je souriais aux passants tout en faisant courir mes cordes vocales. Puis, alors que je chantais, je sentis un air froid me lutiner le front. Je levai les yeux et j’aperçus que le ciel avait pris une teinte anthracite. Le soleil était parti d’un claquement de doigts. De ses nuages commença à sortir quelques goutes de pluie. Je m’empressai d’appeler Griswold pour qu’il vienne me chercher, mais mes efforts ne servent à rien puisque je ne cessais de tomber sur son répondeur. Après trois messages laisser, j’étais déjà détrempé à la lavette. Je décidai donc d’appeler un taxi puisque les orages commençaient à gronder aussi. Gris devait être à une rencontre importante pour avoir éteint son téléphone. Une fois entré dans le taxi, je leur donnai mon adresse et très vite je fus au bas de ma porte.

La clé entra doucement dans la serrure et la chaleur de l’appartement m’envahit. J’étais enfin chez moi. J’enlevai mes chaussures inondées et déposa mon trousseau de clés dans le pot en verre près de la porte d’entrée. Puis, alors que je vins pour crier le nom de Griswold dans le logement pour savoir s’il était à la maison, j’entendis des grognements étranges. D’un coup, je me figeai. Des étrangers étaient chez nous! D’un pas lent et silencieux j’avançais dans l’appartement, cellulaire en mains, vers les sons. Ils provenaient de la chambre à coucher. Tranquillement, je tournai la poignée alors que j’avais déjà composé les premiers chiffres du numéro de la police locale. J’aurais préféré ne jamais ouvrir cette porte. Un frisson froid me monta la colonne. Griswold était par-dessus un autre homme et lui faisait l’amour. J’étais devenu blanc comme un drap. Alors qu’ils allaient changé de position, Gris me remarqua au bord de la porte. Il se leva vers moi abandonnant son immonde amant. « Je peux t’expliquer. » Ma main partit si vite sur son visage que j’avais eu l’impression que mes doigts avaient été collés à sa peau l’espace de quelques secondes. Je ne le regardai pas et je partis en courant.

Ce que j’avais vu n’était pas réel. Ne pouvait pas être réel. Je venais tout juste d’accepter sa demande en mariage. Et pourquoi? Pour me faire tromper. Pourquoi proposer si l’on est pour abandonner? Je marchais si vite que mon souffle était coupé de manière régulière et que j’avais l’impression de m’être fait remplacer les côtes par des couteaux. Je m’arrêtai à quelques endroits et très vite la nuit prit place. J’arrivai à un quai. La pluie avait cessé. Je m’assis sur le bord regardant les quelques pieds qui me séparait de l’eau. J’enlevai la bague à mon doigt et je cédai aux pleurs. Une fontaine coulait de mes yeux. Je n’arrêtais pas de penser à ce que j’avais vu. Ça ne pouvait pas être réel et pourtant, je l’avais vu. Je lâchais un cri de pleurs qui résonna sur les douces vagues puis je lançai ma bague dans l’eau tout en criant « CONNARD! »

C'est le soleil qui avait réveillé Ainsley ce jour là. Il avait réussi à s'infiltrer entre les rideaux de son appartement à la vieille ville et était arrivé en plein sur le visage de la jeune femme qui dormait paisiblement. Quand elle ouvrit les yeux, elle regarda le réveil. Les chiffres annonçant 8:18 brillèrent dans la pénombre, et Ainsley soupira. Se réveiller et savoir qu'elle n'avait pas besoin de se presser car elle bénéficiait de quelques semaines de vacances lui faisait un bien fou. Dans sa tête, elle chercha ce qu'elle avait à faire aujourd'hui. Évidemment, son emménagement n'était pas terminé, elle avait encore une bonne dizaine de cartons à déballer. Cependant, la fainéantise lui fit renoncer à le faire aujourd'hui. Après tout, elle avait encore plus d'une bonne semaine de vacances avant de reprendre le travail. Ainsley se leva difficilement et s'étira avant de se diriger vers la salle de bain. Une fois sortie, elle décida qu'il lui ferait du bien d'aller courir un peu. Avec tout ce qu'elle avait eu à faire durant les dernières semaines, elle n'avait pas eu une minute à elle pour aller évacuer tout le stress qu'elle avait accumulé. C'est alors avec entrain qu'elle se mit à courir, une fois sortie de son immeuble. Un grand soleil brillait dans le ciel et cela la fit sourire. Cependant, alors que cela faisait bien une demi heure qu'elle courait, des nuages menaçants apparurent dans le ciel, et quelques minutes plus tard, il se mit à pleuvoir à verses. En quelques instants, elle fût trempée, et elle décida de rentrer chez elle prendre une douche et se sécher.

Cette odeur d'humidité qu'elle détestait tant s'évapora aussitôt lorsqu'elle franchit le pas de sa porte, et laissa place à l'odeur du neuf et des cartons. C'était mieux que rien. Dès son arrivée, elle fila sous la douche et laissa l'eau couler dans ses cheveux. Elle ne pût s'empêcher de se féliciter. Ainsley n'avait jamais vraiment eu l'occasion de visiter la ville, et aujourd'hui, elle avait même réussi à ne pas se perdre. Elle sourit pour elle-même. La jeune femme avait couru le long de la plage et du port, et avait empli ses poumons de cet air marin qu'elle aimait tant. A cet instant, San Diego lui manqua. Surfer lui manqua presque, et sa grand-mère lui manqua profondément. Ainsley avait choisi cette vie, et balaya d'un mouvement de tête toutes ces pensées négatives. Quand elle eût fini, elle sortit de la cabine de douche et s'enroula dans une serviette. Ensuite, elle partit s'asseoir à son bureau et prit son ordinateur. Elle consulta ses mails, et entreprit même d'en écrire un à sa grand-mère. Elle espéra que celle-ci n'avait pas oublié comment se servir de son ordinateur et consulter ses mails. La jeune femme regarda d'un air distrait par la fenêtre. Le soleil était revenu, et le ciel était de nouveau bleu. Elle regarda l'heure : 2:30pm, elle avait encore largement le temps d'aller se balader en ville. Elle partit s'habiller et attrapa un livre qui trainait dans le coin avant de ressortir. Ainsley partit en direction du port, elle avait besoin d'air marin.

Elle adorait flâner presque autant que travailler. Ne rien faire, c'était un peu une passion pour Ainsley. Quoi de plus agréable que de rester là, à rien faire, sans problème, sans penser, seulement en laissant le soleil caresser sa peau. C'est ce qu'elle fit pendant un moment alors qu'elle s'assit sur un des quais du port, les pieds dans le vide. Pendant plusieurs minutes, elle ne prit même pas la peine d'ouvrir son livre. Mais quand elle commença à être prise de vertiges, elle secoua la tête et ouvrit les yeux. Alors, elle prit son livre et commença à lire. Elle venait de lire pas loin de deux chapitres quand quelque chose percuta brutalement la jambe : « Aie ! » Elle attrapa sa jambe et vit une grande marque ronde dessus. Elle regarda sur l'eau : une bague venait tout juste d'être engloutie par les vagues. Ainsley regarda alors autour d'elle, et une seule personne était assez près d'elle pour avoir pu l'atteindre. C'était un homme blond, assis tout comme elle, mais sur un autre quai. « HEY ! » Elle se leva brusquement et parti vers lui. « C'est quoi votre problème, vous pouvez pas faire attention ? Vous pensez que vous êtes tout seul ou quoi ? Faut vous calmez hein, vous m'avez fait mal en plus! C'est quoi ces conneries ? » Apparemment, le stress n'avait pas disparu. Mais soudain, elle remarque qu'il pleurait. Elle se sentit tout à coup mal. « Oh, hum... » Elle en perdit sa langue.

Je regardais doucement le ciel, les goélands planaient comme si la coupole céleste n’était qu’une tapisserie. Tout semblait n’être qu’un cauchemar auquel je devais absolument me réveiller. La réalité avait sa place dans mon esprit et elle avait été décapitée grâce à quelques coups de hanches données à la mauvaise personne. L’air salin n’arrangea rien à mes troubles. Pourquoi étais-je venu près de la mer? Je n’en avais aucune idée. J’avais le sentiment que c’était là que je devais aller. De ma main je grattai le bois pourri du pont en essayant d’arrêter de faire couler le flot qui se répandait de mes yeux. Mon cœur avait été arraché par les mains de Griswold. Il l’avait pressé pour en sortir tous les millilitres d’amour qu’il pouvait en obtenir. Une fois fini, il l’avait tout simplement mis de côté avec tous les autres et en avait bu le nectar à grande gorgée ne profitant pas d’un seul moment avec moi. Il avait profité de ma naïveté. Mes pieds flottaient dans le vide imitant un faux sentiment de liberté et de chute libres. Comme si je n’étais plus accroché à rien, que je flottais au-dessus de ses vagues qui m’appelaient! Oui, j’étais un marin perdu appeler par les sirènes du fond de l’océan. Ma peine devait se faire consoler par les vagues douces. Un tonnerre grondait en moi tandis que les lames de fond semblaient se plaire conjointement s’embrassant à l’air. Un grondement féroce me dissipa de mes pensées. Je levai la tête et remarque qu’une jeune fille me criait après. Ne prêtant pas attention à ce que la jeune fille disait, j’émis un faux sourire rempli de petits spasmes et je me laissai tomber dans l’eau.

Des secondes, des minutes, des heures se dissipèrent alors que mon corps se laissait tomber à la gravité. Des mètres ou des kilomètres, tout cela n’avait aucune importance. J’avais une nette impression de voler comme si plus aucune main n’avait d’emprise sur mon corps. J’avais laissé mon corps choisir pour lui-même. Il avait décidé de gouter à la liberté, la vraie liberté. L’air qui se glissa sur ma peau me donna la chair de poule. Avant même de pouvoir émettre un seul son de ma bouche, ma nuque s’écrasa contre le mur de brique bleue. J’eus l’impression qu’un torrent de poings venait de se fracasser sur mon corps. L’eau s’envola pour redescendre engloutir mon corps. Au début, je me laissai submerger dans les abysses de la mer en réfléchissant. Combien de temps allais-je rester là? Jusqu’où je pourrais aller? Tout était noir dans ces profondeurs. Je pouvais voir les filaments de lumière traverser l’eau sans plus. La vue embrouiller je me battais contre moi-même, je ne voulais pas remonter vers la terre. Très vite, l’oxygène quitta mon corps et sous un instinct de survie je remontai à la surface. La lumière n’avait jamais paru aussi vivre et l’air aussi pure. J’aspirai un grand coup bruyamment. Battant ma tête à la manière d’un berger allemand. Les larmes qui couvraient mon visage il y avait quelques minutes de ça avaient disparu sous l’eau pour aller rejoindre les autres sirènes.

Je regardai au-dessus de moi et vis la fille me regardant avec des grands yeux globuleux comme si j’étais un monstre de foire. « Je m’excuse pour… peut-importe ce que je vous aie fait » criait-je. Je quittai son regard. Elle me prenait en pitié c’était clair. Je n’avais pas besoin que quelqu’un me prenne en pitié. Je nageai jusqu’à l’une des échelles pour remonter au quai. Lentement, je montai les marches. Un mal de tête s’était pris de ma tête m’arrachant à toutes pensées. Je ne pouvais dire si c’était à cause de ma chute ou de mes froncements de front à force de pleurer. Pour l’instant plus rien n’avait d’importance. J’avais besoin d’une âme chaleureuse. D’un ami. Et tout ce qui s’écrasait à moi c’était une bonne femme qui semblait furieuse contre moi. Une fois, rendit en haut du quai je marchai jusqu’à elle et je tendis ma main. « Ariel. » Puis je remarquai que j’avais tout plein de sang dilué sur la main. Je saignais du nez. « Et merde! Vous n’auriez pas du … Du… J’sais pas du papier mouchoir? » Je n’étais pas très confortable à la vue du sang, qu’il fût mien ou non. « Même un tampon ça ferait l’affaire » je tremblais légèrement essayant de ne pas montrer ma vulnérabilité à cette pauvre inconnue qui devait me prendre pour un débile. Puis… Un tampon toutes les filles avaient ça non? Pas un utilisé, bien évidemment! Certaines personnes ont l’esprit tordu.