pia & eyla

Je me levai péniblement de mon lit vers dix heures du matin et enfila mes chaussettes, car le carrelage me faisait souffrir... Il était bien trop froid. Je m'enroulai de mon plaid afin de survivre aux dix mètres carrés qui séparaient ma chambre de la cuisine ou le café venait de se faire. C'est une merveille ces cafetière qui se programment. Je me servis un grand bol de ce précieux liquide noir afin de me raviver l'esprit. Aujourd'hui allait être une bonne journée, normalement. J'allais aller au boulot, tomber sur des patients plutôt tranquille d'après ce que j'avais lu hier de leur dossier et allais finir relativement tôt, soit vers dix-huit heures. Je me demandais déjà ce que j'allais faire après être rentrée. Peut-être boire un verre en ville, je n'sais pas. Mais le temps passe vite, et on ne le voit pas passer en rêvassant bien sûr voilà que j'allais être en retard, moi, Pia, l'éternelle ponctuelle.
Je me rendis dans ma chambre afin de choisir mes vêtements. Quelque chose de sobre, un petit haut décolleté et une jupe de la même couleur, avec des escarpins cela fera l'affaire. Pour le maquillage, j'avais toujours opté pour la simplicité. Un coup de mascara et un joli rouge à lèvre marron qui m'allait comme un gant. Et voilà, plus qu'un brossage de dent et j'étais prête. En avant la journée, je t'attends.

En arrivant au cabinet, la secrétaire me prit à part un instant pour me dire qu'un rendez vous avait été annulé et remplacé par une nouvelle patiente que je n'avais encore jamais rencontré. Cette nouvelle me prit de cours puisque je ne faisais jamais ça, prendre un nouveau patient sans étudier son dossier avant. Mais bon, la vie était pleine de défi et c'était le genre de défi que je me sentais apte à faire face.

J'ouvris mon bureau et déposai mon sac à main, lorsque Georgina ma secrétaire la fit entrer.

C'était une jolie jeune fille d'à peu près une vingtaine d'années peut-être, et jolie c'est peu dire, elle aurait pu être mannequin tant elle était belle et longiligne. Son visage avait l'air d'être celui d'une poupée, d'une poupée jolie mais triste, un air vague. Elle fit alors le premier pas, ce qui facilitait la tâche et qui montrait qu'elle avait envie qu'on l'aide.

« Ahem… Alors euh… Je suis Eyla Kymlush et je souffre de trouble bipolaire. Il faut savoir que vous n’êtes pas mon premier psy, j’ai battu gravement mon premier psy, quasiment violé le deuxième, et les autres n’ont pas été mieux doooooonc… Faut rester bien accrocher, avec moi. J’ai déménagé dans cette ville il n’y a pas longtemps. Car elle est calme. Je crois. Hm. Bref. C’était pour savoir… Si vous vouliez être mon psychologue. Et vous avez… Une très belle poitrine en tout cas… »

Je ne sais pas pourquoi mais mon premier réflexe fut de rire. D'un rire cristallin qui perça la torpeur monotone du bureau. Un rire où l'on pouvait quand même percevoir une sorte de malaise. Je repris mon calme, car de toute façon il le fallait. Cette fille avait besoin d'être recadrée et j'allais l'aider.
« Eyla, tu as toujours été si... directe? Il ne va rien se passer, parce-que tu vas trouver la force en toi et te rendre compte que ceci est juste ta maladie. Ecoute toi, écoute au fond de toi et dis moi que tu ne feras rien, parce-que c'est ta maladie. »

Cette patiente me déstabilisait un peu. Bipolaire, disait-elle ? Je dirais même à tendance nymphomane et surtout détraquée. Cette fille a-t-elle reçue une éducation ? Etait-elle battue ? Avait-elle reçu des sévices sexuels durant son enfance ? J'espèrais juste qu'elle allait me parler.

« Eyla, si tu veux bien, on va parler de toi. Tu es ici pour ça non ? » J'eue un franc sourire. J'allais sauver cette gamine. « Parle moi de ton enfance, s'il te plait. Raconte moi un beau souvenir et ensuite, un autre mais qui t'a fait du mal. »

Je ne savais pas ce que ça allait donner, mais je tentais. Cette jeune femme et moi n'avions pas beaucoup de différence d'âge mais je ressentais son manque de repères rien qu'en l'entendant respirer... Faites qu'elle ne me rejette pas.