On ne peut pas dire que ces derniers temps j'ai eu trop de temps pour moi. Je jongle entre ma relation toute neuve avec Willow, et mon nouveau boulot de flic. Ce n'est pas facile tous les jours, mais il faut s'y faire. Ma nouvelle vie à Town Square est à l'antipode de ce que j'imaginais quand je suis venue vivre ici. Mais je ne pouvais pas m'en plaindre, je commençais enfin à aimer ma vie, ce que j'en avais fait, et à oublier doucement le passé et les blessures qui allaient avec.

Ce matin, Willow travaillait et en bonne insomniaque et hyperactive que j'étais, j'avais besoin de bouger. Jules, mon petit bouledogue avait lui aussi envie de se dégourdir les pattes. Je montais donc dans ma nouvelle voiture et roulais jusqu'à trouver un espace vert convenable pour pouvoir me défouler sans croiser trop de monde. Ce lac me paraissait l'endroit idéal. Il n'y avait pas trop de monde, et j'allais pouvoir courir sans avoir Jules en laisse. Je garais alors la voiture et laissais mon chien descendre alors que je retirais ma veste. Je m'échauffais quelques minutes et parais pour quelques petites foulées entre les arbres, autour du lac. L'endroit était quasiment désert. L'endroit idéal aussi pour qu'il m'arrive quelque chose. Parfois j'étais un peu inconsciente !! Mais bon, en entrant dans la police, j'avais appris à me défendre efficacement. Et puis, j'avais mon beeper pour prévenir Mike en cas de danger. Mike était le frère de Willow, mais il était surtout devenu un ami et un collègue hors pair.

J'agrandissais mes foulées peu à peu, laissant entrer l'air frais dans mes poumons. Je me promettais d'ailleurs de ralentir la nicotine, ce n'était pas très compatible avec l'exercice physique. Jules faisait sa vie près de moi, il ne me lâchait jamais longtemps.

Lorsque je reçus un sms de Willow, je sortis mon téléphone de ma poche, tout en continuant de courir, et sans faire attention où je mettais les pieds, je rentrais dans un jeune homme lui aussi en train de courir en sens inverse de moi. Mon téléphone valsait et tombait dans le lac alors que je jonchais le sol, un mal atroce au niveau de l'épaule. On ne s'était pas loupés !!!

Mais ce n'est que lorsque l'homme me fit face que je le reconnus. Je mis quelques secondes avant de remettre un prénom sur ce visage, et surtout à resituer l'endroit de notre rencontre. J'avais une bonne mémoire. Sven avait été un simple flirt il y a quelques années. Il ne savait pratiquement rien de ma vie, comme je ne connaissais pratiquement rien de la sienne. Mais le revoir ici était presque étrange, cela faisait remonter des souvenirs d'un passé que j'avais tenté d'oublier, d'enterrer...

Quand on s'apprêtait à quitter l'appartement pour aller faire un bon jogging, on ne prennait pas la peine de prendre une douche, logique. Ce qui était moins logique pour certains, c'est de e prendre qu'un café noir avec un sucre avant de partir. C'était de cette façon que Sven se levait le samedi matin. A peine réveillé, huit heures tapantes, il enfilait un slip propre, un short large et un tee-shirt gris, des chaussettes, une paire de baskets, prenait son café en deux minutes, attrapait son lecteur multimédia et et sa bouteille d'eau et fermait la porte, clefs de voiture en main, direction de lac de Town Square.

C'était l'un de ses trois lieux favoris pour faire son jogging, il allait aussi dans un grand parc en centre ville et au port quand il avait envie d'un bol d'air marin. De cette façon, le jeu était moins monotone, quand il en avait marre de tourner en rond autour d'un point d'eau, il se faisait un aller-retour près des bateaux mais de bonne heure un samedi comme ça, il y avait aussi de la place pour se garer tranquillement en ville. Aujourd'hui, il avait envie de nature donc un bon endroit boisé rafraîchit par un point d'eau c'était agréable.

Arrivé sur place, il gara sa voiture et pris juste ses clefs et son lecteur avec lui, puis, resserrant l'élastique qui retenait ses cheveux et activant la musique, il engagea sa première foulée et partit pour un peu plus d'une demie heure de course.
Il n'y avait pas grand monde le matin comme ça, que des coureurs en fait. Il y en avait plus que le matin en semaine, ceux qui venaient se mettre en forme avant d'aller au boulot, mais il y avait souvent moins de jeunes sportifs quand même, vendredi soir de fête oblige.

ACDC de manière très audible dans les oreilles, Sven ne voyait pas passer le paysage, trop parti dans ses pensées. Le grand air et le sport ça lui changeait bien les idées et l'aidait pas mal à trouver des idées pour le boulot. Il suffisait d'avoir la bonne musique pour l'inspiration !
Donc effectivement, la jeune femme qui arrivait droit sur lui, il ne la vit qu'au dernier moment mais ... le mal était fait. Et tout se passa très vite : il la vit arriver, freina d'un coup, elle lui rentra dedans, rebondit à moitié et tomba à terre, pendant qu'il finissait sur le cul et que le portable de la demoiselle finissait dans le lac. Cool...
Un peu hagard et surpris, il ne se releva pas tout de suite, restant le cul par terre. Son premier mouvement fut pour couper la musique vu que de toute façon les écouteurs s'étaient barrés. Il se releva alors en époussetant ses fesses.

Euuh, ça va ?

Elle commençait à se relever d'elle-même mais il lui tendit la main, à tout hasard, autant pour lui proposer de l'aide que pour esquisser un geste d'excuse et puis il allait vite savoir si elle était du genre sympa ou totalement hystérique... avait-elle vu la fin de son portable ?
Quand il vit son visage et qu'il croisait son regard, Sven eut l'impression de l'avoir déjà vu. Après tout, Town Square n'était pas si grande, c'était bien possible qu'ils se soient déjà croisés, mais ça ne collait pas. Il avait déjà vu cette fille typé asiatique quelque part mais pas par ici. En tout cas rien à dire, elle était très mignonne ... Attends ... Non, les circonstances ne lui revenaient toujours pas. Continuant à réfléchir, il reprit :

Vraiment désolé pour la portable ... il est waterproof ou ...?

Sven était encore les fesses par terre quand il me demanda «Euuh, ça va ?». Je me contentais pour l'instant d'hocher la tête à l'affirmative, même si j'avais quand même bien mal à l'épaule. C'est pas que, mais ce mec était une vraie armoire à glace. Il était déjà barraque à l'époque, mais là c'était encore pire ! Je commençais à me relever et il me venait en aide en me tendant la main, que je pris pour me remettre sur pieds. J'époussetais mes fesses pour retirer les quelques brins d'herbe et les particules de terre, et je relevais les yeux vers le jeune homme. 

J'échangeais avec lui un nouveau regard, qui fut plus insistant de son côté. Si je l'avais déjà reconnu, ce n'était visiblement pas son cas. Cela m'amusait. Je ne l'avais pas tant marqué que ça. En même temps, en une soirée, une nuit. C'est compliqué de marquer les esprits, surtout que ça datait... peut être de 2, ou 3 ans... une de ces rares soirées où je m'octroyais un break pour sortir avec mes amies. Ça n'arrivait que rarement à l'époque, c'est sûrement pour ça que je me souvenais bien de lui...

Je sortis de mes pensées quand le jeune homme me demanda : «Vraiment désolé pour le portable ... il est waterproof ou ...?». Je tournais la tête et balançais mon regard vers ce qu'il restait de mon portable, sous l'eau. Je pouvais encore l'apercevoir, il était sur le bord, mais bel et bien dans l'eau. Je me baissais pour récupérer ledit téléphone et appuyais sur le bouton, dans un élan d'espoir. Je soupirais et relevais mon regard vers Sven. «Non... j'aurai bien aimé pourtant... je vais récupérer la puce, ma boîte m'en repaira un !» J'essuyais comme je pouvais la carcasse du smartphone et l'enfournais dans ma poche. Jules refit son apparition et commença à renifler les mollets de Sven. Je savais qu'il n'allait pas lui faire de mal mais c'était plutôt gênant. «Jules ! laisse Sven tranquille ! Chut ! File !!!!!!». Il repartir aussitôt faire sa vie et je m'excusais auprès du jeune homme. «Je suis désolée, il est tout jeune et assez curieux !».

Je comprenais dans son regard qu'il n'arrivait toujours pas à mettre un prénom sur mon visage, ni même à resituer notre rencontre. Ça me faisait sourire. Je secouais la tête avec amusement et finis par l'aider. «Eileen... on a... enfin... on a passé une soirée ensemble à Ottawa... ça devait être il y a.. pfiou 2 ou 3 ans je pense... !». Je lâchais un petit rire quelque peu nerveux. Ce n'était pas vraiment moi ça, de coucher un mec et de ne plus jamais le revoir. Ça n'avait jamais été mon genre, mais comme quoi, tout peut arriver. Et retomber sur lui ici, c'était assez étrange. J'essayais comme je pouvais de me dépatouiller de cette situation, je ne savais pas trop si je devais lui poser des questions sur lui, ou fuir... Je me tentais alors à lui demander «Alors, tu... tu habites dans le coin ? Je savais que tu vivais aux states mais je pensais pas dans un coin aussi pommé de l'Oregon !». Je me pinçais la lèvre comme je le faisais toujours quand j'étais stressée ou angoissée. C'était un tic en quelque sortes. Je redevenais carrément une enfant quand je me trouvais dans une situation aussi embarrassante que celle ci.

Il s'en voulut rapidement de ne pas d'être rappelé d'elle avant. Pourtant ce n'était pas tous les jours qu'il côtoyait de belles jeunes femmes d'origine asiatique... d'aussi près. Car oui, en fait la première chose qu'il se rappela d'elle, c'était son regard. De beaux yeux sombres, très doux, mais à l'époque ils s'étaient tous deux connus dans un endroit plutôt sombre et n'avaient pas vraiment trouvé urgent d'allumer une lumière. Du coup ceci expliquait cela, le fait qu'il ne l'ait pas reconnu avant, ... même si elle semblait avoir mis un nom sur sa tête bien plus rapidement. Ouais bon voilà, vu la différence de contexte et de lieu, bon.
Par contre son nom ne lui était pas revenu avant qu'elle ne le lui dise, disons qu'il cherchait dans les bonnes sonorités mais qu'il n'y était pas encore à ce moment... mais c'est alors avec un gentil sourire qu'il prit cette rencontre violente ou retrouvaille inattendue.

A l'époque, il était monté sur Ottawa pour un entretien dans une grosse boîte, il n'avait pas été retenu mais c'est tout de même grâce à cette entrevue qu'il avait rencontré son patron actuel, qui lui avait changé d'entreprise entre temps et qui s'était rappelé de sa présentation. A la suite de ça, il était allé en soirée avec des camarades à lui - disons anciens camarades de promo mais qui étaient maintenant des concurrents pour les places à pourvoir - et s'était pas mal éclaté à faire le con jusqu'à ce qu'il croise le regard de cette jolie demoiselle et qu'il tombe sous son charme. Et puis, de fil en aiguille, il avait abandonné ses potes et avait profité d'une nuit de tendresse totalement improvisée, mais à la fin, même si le sourire était là, il ne savait pas trop ce qu'il devait dire ou faire - comme à chaque fois qu'il se retrouvait dans cette situation, ce qui n'était pas si courant que ça - et ils s'étaient quitté comme ça.

Le dit Jules resta quelques secondes à lui tourner autour en reniflant bruyamment puis repartit dans son exploration. C'était spécial ces bêtes là, elles lui faisaient franchement penser à des cochons avec le bruits qu'elles faisaient... Bref, autant dire qu'il ne l'avait pas du tout remarqué et tout juste vu arriver.
Bon, en tout cas, même si elle était verte comme n'importe qui l'aurait été pour ce portable fichu, elle restait zen.

«Eileen... on a... enfin... on a passé une soirée ensemble à Ottawa... ça devait être il y a.. pfiou 2 ou 3 ans je pense... !» Sven lui sourit avec un regard amusé à cause de cette situation cocasse. Il lui répondit comme il put. "Excuse-moi, c'est vrai que je ne retrouvais plus ton prénom et j'ai mis du temps à ... enfin. Malgré tout, je ne savais pas que ça datait d'il y a si longtemps. C'est vrai que c'était sacrément bizarre qu'ils se revoient dans leur vie de tous les jours, tout ce temps après et surtout dans un lieu connu que des quelques habitants de Town Square. "Ouais, j'habite à Town Square depuis que je suis arrivé aux states, c'est plutôt ta présence qui m'intrigue, comme quoi le pays est pas aussi grand qu'on le croit ! Alors t'es de passage où tu t'es laissé charmer par notre petite ville ?

La séance de ce matin était quelque peu compromise - tout du moins dans l'instant - et ils avaient l'air bien attardés à être là en plein milieu du circuit, debout au milieu de nulle part. Mais cette retrouvaille était tellement inattendue qu'ils ne pouvaient décemment pas passer leur chemin avec un signe de tête cette fois.

C'était plutôt étrange de se retrouver dans une telle situation. Tout d'abord parce que ce genre de "chose" ne m'était arrivé qu'une fois, voire deux grand maximum. Par "chose" je veux dire coucher avec un inconnu rencontré le soir même et oublié le sur-lendemain. Il était grand, beau, il avait un sourire à vous faire fondre le plus gros des iceberg. Alors cette nuit là, j'avais craqué. Je ne me souviens plus de grand chose mis à part que j'avais passé une très belle nuit, mais que tout s'était arrêté là. Me retrouver aujourd'hui face à lui me faisait bizarre. Non pas parce qu'il me plaisait toujours, puisque mon coeur était pris désormais, mais simplement parce que se retrouver face à quelqu'un qui vous connaît dans l'intimité, sans forcément vous connaître bien tous les deux, ça reste une situation étrange.

J'essayais de faire comme si tout était normal, comme si j'avais reconnu un vieil ami dans la rue, mais tout ça restait quand même assez gênant. Je tentais de lui poser une question, comme ça l'air de rien, comme si tout allait bien. Ce a quoi il me répondit qu'il vivait ici depuis toujours. C'était bien ma veine ça ! Tomber sur un plan d'un soir dans la ville où je viens de m'installer. Comme quoi il n'y a pas de hasard dans la vie. J'esquissais un sourire à la fois interloqué et à la fois amusée.  « Ouais, j'habite à Town Square depuis que je suis arrivé aux states, c'est plutôt ta présence qui m'intrigue, comme quoi le pays est pas aussi grand qu'on le croit ! Alors t'es de passage où tu t'es laissé charmer par notre petite ville ?». Bonne question. «Euhm... ben en fait j'ai quitté le canada pour des raisons... disons compliquées, et j'ai pris une carte de l'Amérique, j'ai posé mon doigts au hasard et c'est tombé sur Town Square ! Le monde est petit hein !». Je lâchais un petit rire amusé.

C'est vrai que depuis quelques mois que j'habitais ici, il s'en était passé des choses. J'avais rencontré quelqu'un, changé de boulot, retrouvé ma meilleure amie qui était pourtant partie en Alaska durant plusieurs années. C'était encore plus étrange de retrouver un plan d'un soir ici, ce matin, en faisant mon footing. J'étais assez interloquée par ce que la vie pouvait nous apporter comme lot de surprise. «Je vis ici depuis quelques mois, c'est étonnant qu'on se soit pas croisés avant !».

On commençait à marcher doucement l'un à côté de l'autre. Je levais la tête pour le regarder quand on se parlait. Je ne me souvenais pas qu'il était si grand. Oui, bon, j'étais petite aussi, mais c'est pas une raison ! C'est pas humain d'être si grand ! J'avais presque envie de lui demander si il avait été élevé dans une casserole de soupe aux épinards ! J'hésitais un instant, et lui demandais finalement. «Et... tu fais quoi, ici, à Town Square ? Enfin j'veux dire, tu bosses dans quoi ?». Après tout, on était là maintenant, côte à côté, on allait pas une fois de plus se faire un signe de main et séparer nos routes comme la première fois ! On aurait pu certes, mais maintenant que je savais qu'on vivait dans la même ville, ça aurait été con, puisqu'on allait sans doute être amenés à se recroiser.

Je trifouillais nerveusement mon téléphone dans ma poche et pensais que Willow allait peut être s'inquiéter que je ne lui réponde pas à son sms. J'attendrais un peu, et peut être que je demanderai le téléphone de Sven pour lui envoyer un message. Ça se fait ? Hum. Je sais pas. On verra !

Bien entendu, plus il la regardait, plus il se demandait comment il avait fait pour ne pas la reconnaître. Son regard, son visage si doux et sa bouche pulpeuse, tout cela lui paraissait beaucoup plus familier maintenant. Mais après une histoire comme la leur, il était difficile de savoir sur quel pied danser, comment se parler. Tout ce qui était sûr, c'est que rien ne pouvait être repris là où il avait été laissé, pas après tant de temps.
Même si la situation était du genre gênante, Sven ne l'était pas vraiment lui-même. Il avait la tête sur les épaules et le regard plus tourné vers l'avant que l'arrière. Oui, il l'avait connu dans le plus simple appareil, il s'était passé des choses dans le noir, mais c'était du passé, même si c'était la seule chose qui les reliait l'un à l'autre. Enfin non, pas vraiment, vu qu'ils s'étaient plus, ils avaient forcément des choses en commun, ils s'étaient bien entendus quoi, alors pourquoi ne pas repartir sur cette base ? Après peut être qu'avec le temps la situation évoluera mais tout cela était déjà trop perdu dans les suppositions du futur.

Quand elle lui dit qu'elle était tombé à Town Square sur un coup de hasard, Sven ne sut pas si elle état réellement sérieuse, mais elle ne semblait pas vouloir beaucoup développer sur les affaires qui l'avait amené à partir, il n'allait donc pas insister. L'écoutant raconter son histoire, il laissa un petit rire franchir la barrière de ses lèvres souriantes. Et reprenant un semblant de sérieux, il prit part à nouveau à la discussion. C'est vrai que la ville est pas si grande, et puis on aurait pu déjà se croiser ici, j'y viens quoi, trois fois dans le mois ? J'aime bien changer de paysage pour aller courir.

Il avait fini par faire demi tour, histoire de faire un bout de chemin avec elle et en regardant autour d'eux, il vit le chien qui trottait plus loin. Comment arrivait-elle à courir, regarder son portable et gérer le chien en même temps ?! Ah, question bête, ... elle y arrivait pas.

«Et... tu fais quoi, ici, à Town Square ? Enfin j'veux dire, tu bosses dans quoi ?»
Il tourna de nouveau la tête vers elle.Ce que je faisais quand on s'est rencontrés, enfin presque. Je bosse dans une boîte de pub, mais apparemment on va changer de PDG et tout le changement dont on nous parle ne me plait pas franchement... Bref, toi tu as trouvé du boulot ici ? Ouais bon, il se sentait un peu nulle là, à ne demander que ce qu'elle venait de lui demander, mais en même temps ça semblait tellement logique ...

«C'est vrai que la ville est pas si grande, et puis on aurait pu déjà se croiser ici, j'y viens quoi, trois fois dans le mois ? J'aime bien changer de paysage pour aller courir.» me dit-il. Je lui offrais un sourire mignon. C'est vrai qu'il avait la carrure d'un homme qui fait beaucoup de sport. «Je m'y remets à peine, ça faisait un moment que j'avais pas couru, mais pour mon boulot je commence à en ressentir le besoin..!». J'enfouissais mes mains dans les poches de mon survet et haussais les épaules avant de le regarder pour lui demander ce qu'il faisait dans la vie.

Cet homme avait vraiment beaucoup de charme, et ça ne m'étonne pas que j'ai pu craquer pour lui il y a quelques années. Aujourd'hui les choses avaient bien changé, et même si c'était le bordel dans ma vie sentimentale, je savais ce que je voulais, et elle avait un prénom : Willow. Je ne sentais pas pour l'instant que Sven essayait de me draguer, au contraire il était plutôt gentil et laissait assez de distance face à cette situation cocasse.

Il répondit alors à ma question, m'expliquant qu'il travaillait encore et toujours dans la pub. J'avoue que je n'aurai pas pu remettre un métier sur son visage, cela remontait à trop longtemps, et même s'il bossait déjà dans ce milieu, je n'en avais aucun souvenir. Rapidement il me retourna la question et un léger sourire naquit au bord de mes lèvres. «Je suis en pleine reconversion en fait... jusqu'à y'a 15 jours j'étais une simple auteure, je bossais chez moi, et j'en ai eu marre. Alors j'ai passé le concours d'entrée à la police et j'ai été admise au commissariat de Town Square.» C'était à lui de me faire les yeux ronds désormais. Je lâchais un petit rire amusé. Effectivement, un petit bout de femme comme moi, on ne la voit pas forcément dans la police. Mais bon, j'avais quand même un caractère bien trempé, je savais ce que je voulais, et surtout j'étais très forte pour ce qui était de résoudre des énigmes. Un cerveau parfois même trop en agitation. C'est ce que mon collègue et ami Mike me disait toujours.

«Du coup voilà le pourquoi du comment je me mets un peu à courir. Pas que je sois pas musclée mais faut que je gagne un peu en cardio. Et j'aime pas courir dans des salles de sport. En plus, y'en a un qui ne s'en porte que mieux !» lui dis-je en faisant un signe de tête vers Jules qui trottinait devant nous. Un petit silence s'installait, et, pensant fortement à Willow, je me tentais à demander à Sven : «Dis, j'peux abuser une seconde et te demander ton téléphone, si tu en as un ? En fait ma copine m'a envoyé un sms tout à l'heure, et j'ai peur qu'elle s'inquiète, faudrait que je l'appelle ou au moins que je lui envoie un message...» Je grimaçais légèrement. J'avais conscience de que de dire "copine", ça pouvait autant passer pour petite amie que pour simple amie. Et puis quand quelqu'un comme Sven ne me connaît que de par une nuit de sexe, c'est assez compliqué de penser que cette "copine" était autre que pour moi la femme de ma vie.

Effectivement, Sven la regardait avec des yeux ronds. Il se serait attendu à tout sauf à ça ! Même s'il avait eu du mal à se rappeler de son prénom au départ - bon ok, elle l'avait un peu aidé - maintenant, les quelques discussions qu'ils avaient eu ensemble ce fameux soir, lui revenaient petit à petit. Du coup, quand elle lui parla de son ancien gagne pain, il se rappela qu'elle lui avait déjà parlé d'un fait qu'elle écrivait pour vivre. Mais la police ... ce petit bout de femme devait sacrément tenir la forme pour avoir réussi à passer les tests physiques d'entrée dans les forces de l'ordre, comme quoi, il valait mieux se méfier de tout le monde, héhé ! En même temps, c'était marrant de voir comment les gens pouvaient changer de vie comme ça, se lancer dans un projet du jour au lendemain et changer de vie du tout au tout.

C'est vrai que pour sa part, il avait su assez rapidement ce qu'il voulait faire et avait bossé comme il faut pour y arriver. Remettre au lendemain ce qui pouvait être fait le jour même, ce n'était pas son genre, en clair, il avait eu pas mal de facilités, la motivation et s'il avait voulu aller plus loin, il aurait pu. C'était pareil dans la vie qu'il avait maintenant. Il faisait son boulot en temps et en heure, travaillant et retravaillant des projets pour satisfaire les clients mais en allant se défouler dès qu'il pouvait pour ne pas être victime du stress. Mais tout cela avait apparemment pesé sur ses relations, il avait des amis mais qu'il ne voyait pas si souvent que ça - à part ceux qui étaient du genre à venir se dépenser avec lui - et ses amours n'avaient jamais été très concluants.

Il y eu un court silence, alors qu'ils marchaient tous deux, traînant limite des pieds, regardant le chien qui ne se souciait pas vraiment d'eux. Puis, Eileen reprit. «Dis, j'peux abuser une seconde et te demander ton téléphone, si tu en as un ? En fait ma copine m'a envoyé un sms tout à l'heure, et j'ai peur qu'elle s'inquiète, faudrait que je l'appelle ou au moins que je lui envoie un message...» Sans même attendre la fin, Sven fourrait déjà la main dans sa poche pour attraper son portable et le lui tendit sans plus de cérémonie. Abuse, abuse, c'est aussi un peu de ma faute si le tien est hors service alors ... Il réfléchit deux secondes en fronçant les sourcils et :En fait je me rends compte que si ça m'arrivait je serais bien dans la merde, je ne connais même pas le numéro de ma propre soeur...
Voilà, si elle connaissait le numéro à composer, il pouvait bien lui rendre ce service... Mais ce "ma copine" lui faisait bizarre quand même, se dire que cette charmante jeune femme tout à fait attirante avait les mêmes goûts que lui à présent, c'était spécial, surtout quand il s'agissait d'une ancienne conquête. En tout cas, c'était ce qu'il avait cru comprendre, sinon elle aurait simplement parlé d'"une amie" ou d'"une copine". Et puis dans le même coup il apprenait qu'elle était prise quoi, au moins il était fixé, s'il avait voulu il n'avait plus aucune chance !

Alors qu'elle se servait du portable, il reprit la conversation où elle en était : Alors comme ça la police hein, comme quoi t'es pas tombé réellement par hasard sur Town Square si t'as eu un poste ici... Puis, le sourire aux lèvres et le regard plein de malice, il rajouta dune petite voix : Eh, j'ai le droit d'espérer une peine allégée si je fais une bêtise ?

Plus rapidement encore que je l'imaginais, Sven enfouissais sa main dans la poche de son short pour en sortir son téléphone, et me le tendre amicalement. «Abuse, abuse, c'est aussi un peu de ma faute si le tien est hors service alors ...En fait je me rends compte que si ça m'arrivait je serais bien dans la merde, je ne connais même pas le numéro de ma propre soeur...». Je ne pus retenir un petit rire en récupérant son téléphone. Je le regardais et secouais la tête d'un air amusée. Effectivement, il y avait comme ça des numéros qu'il était préférable de retenir. J'avais une très bonne mémoire et ce n'était pas un souci pour moi. «Merci !» lui dis-je simplement avant de pianoter un sms à Willow. Jessayais cette fois de regarder où je marchais pour ne pas faire une seconde catastrophe, ça m'embêterait pour le portable de Sven !

Sa voix me fit relever la tête alors que j'étais en train d'inscrire le numéro de Willow pour faire partir le sms. «Alors comme ça la police hein, comme quoi t'es pas tombé réellement par hasard sur Town Square si t'as eu un poste ici... Eh, j'ai le droit d'espérer une peine allégée si je fais une bêtise ?». Cette fois ci c'est un rire franc qui sortit de ma bouche. Je le bousculais gentiment en lui donnant un petit coup d'épaule. «Non mais tu crois que tu vas t'en tirer comme ça ? J'suis pas rentrée dans la police pour retirer les pv de mes amis !» Je secouais la tête en souriant. Il en tenait une bonne couche celui là. «A moins qu'il y ait une vraie circonstance atténuante, je ne pourrai rien faire pour toi !». J'haussais les épaules avec une petite moue en lui rendant son téléphone. « Et pour répondre à ta question, effectivement, je pense que je ne suis pas là par hasard. Tout m'amenait à faire ce boulot même si je ne m'y voyais pas plus que ça. Et il se trouve que ça me plait beaucoup.».

J'enfouissais de nouveau mes mains dans mes poches alors que je tournais les yeux vers lui. J'étais de nature curieuse, et la fameuse phrase "t'es de la police?" se prêtait très bien à mon cas puisque j'avais tendance à poser beaucoup de questions, beaucoup trop ! « Et toi alors, depuis 2 ou 3 ans... ça te fait quoi... 27 si mes calculs sont bons... tu as trouvé la perle rare ?». Oui, c'était un peu osé de demander ça, mais après tout, on n'était plus à une fioriture près. On avais couché ensemble pour mettre un mot dessus, alors je n'allais pas prendre des pincettes pour lui demander s'il avait quelqu'un dans sa vie. Le truc c'est que je ne me rendais pas trop compte, mais ma question aurait pu paraître intéressée. Évidemment ce n'était pas le cas, c'était plus de la curiosité qu'autre chose.

Et même s'il m'avait plu à l'époque, et même si ma vie sentimentale était en bordel en ce moment, mon coeur était pris...

Sven était plutôt content de pouvoir la faire rire, ça voulait sans doute dire qu'elle était déjà plus à l'aise. C'est sûr que depuis le départ ça se voyait clairement qu'elle savait pas où se mettre. Disons qu'elle ne devait pas être du genre à se faire une soirée, comme celle qu'ils avaient vécu, tous les soirs. Surement pour ça aussi qu'elle l'avait reconnu rapidement. Mais comme déjà dit, tout cela était déjà loin et apparemment mademoiselle était prise. Non, franchement il préférait que tous deux se retrouvent à siroter une bière dans un bar de temps en temps mais il n'espérait pas plus à moins qu'ils ne se détectent un point commun incroyable et qu'ils deviennent les meilleurs amis du monde, mais cela, il en doutait. Bon, ça restait un mec quoi, même s'il était du genre sympa et tout, à s'entendre avec tout le monde, il s'attendait pas à rester en contact avec une "ex" plus que ça. Ça se contredisait un peu ? Possible ... mais entre ce qu'on veut et ce qu'on fait...

Nan mais de toute façon si tu me trouves à faire une connerie c'est un pur accident ... ou que quelqu'un m'a vraiment gonflé. Donc pas de danger, ni pour toi, ni pour moi ! dit-il en reprenant un peu son sérieux et rangeant son portable.

Mais ce qui était dommage, c'est qu'ils n'avaient pas tant de choses à se dire, même si apparemment ils s'appréciaient tout de même. C'est ça d'avoir connu quelqu'un et de ne rien savoir sur elle... En tout cas, lui ne trouvait pas grand chose à dire, mais Eileen savait relancer la discussion.

« Et toi alors, depuis 2 ou 3 ans... ça te fait quoi... 27 si mes calculs sont bons... tu as trouvé la perle rare ?»

Sven sourit. C'est sûr que c'était drôle de parler de ça avec une ancienne conquête, mais après tout, c'était la seule chose qui les reliait pour le moment. Et bien que la question aurait pu paraître intéressée, il ne le prit pas comme tel quand il répondit :

Eh non, malheureusement... Disons que l'on m'a tellement répété que tout ça arrivait quand on s'y attendait le moins, bin je ne fais pas tant d'efforts pour rechercher la femme de ma vie et elle ne m'est pas encore tombée dessus, elle dit-il en souriant, se rendant compte que c'était ce qu'il venait de se passer avec Eileen. Mais j'avoue que le célibat commence à me taper sur les nerfs, voir mes amis qui sont presque tous casés et que certains ont même des gosses, ça en deviendrait déprimant si j'avais pas une vie aussi trépidante. Et alors toi, ça t'es tombé dessus comment ?

Et là, Sven pria ses ancêtres d'avoir bien compris ce qu'elle avait dit précédemment, sinon il se retrouverait bien con... Mais bon, une fois de plus ou de moins...